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Page:Tannery - Pour l’histoire de la science Hellène.djvu/354

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POUR L’HISTOIRE DE LA SCIENCE HELLÈNE.

membres mobiles du corps, — tel se présente l’intellect des hommes ; car c’est cela même — qui pense, c’est la nature des membres humains — pour tous et pour chacun ; car c’est le plus qui fait la pensée. »

4. Ainsi il confond, dans son langage, la sensation et l’intelligence, et il dérive dès lors aussi la mémoire et l’oubli du tempérament entre les éléments ; mais si ceux-ci se balancent à égalité dans le mélange, y aura-t-il pensée ou non ? Quel sera le résultat ? Il ne détermine plus rien.

Que d’après lui le contraire en lui-même produise d’ailleurs une sensation, c’est ce qui ressort clairement de ce qu’il dit, que le cadavre, par suite du défaut de feu, ne perçoit ni la lumière, ni la chaleur, ni la voix, mais qu’il sent le froid, le silence et les contraires, et qu’en général tout ce qui est a une certaine connaissance. C’est ainsi qu’il semble avoir coupé court par une affirmation aux difficultés résultant de sa supposition.

5. Platon a un peu plus touché aux sensations particulières ; cependant il n’a pas parlé de toutes, mais seulement de l’ouïe et de la vue. Cette dernière serait produite par un feu sortant de l’œil jusqu’à une certaine distance, tandis que la couleur serait aussi comme une flamme partant du corps et ayant des particules proportionnées à celles de la vue ; il y aurait donc rencontre de deux effluves qui doivent s’harmoniser et s’incorporer réciproquement l’une à l’autre ; c’est ainsi que nous verrions. Il semble de la sorte avoir adopté une opinion intermédiaire entre celle qui fait partir le mouvement de l’œil et celle qui le fait au contraire aller à l’œil des objets visibles.

6. Quant à l’audition, il la définit au moyen du son ; le son est un choc de l’air par les oreilles sur l’encéphale et le sang, choc qui parvient jusqu’à l’âme ; l’audition est le mouvement que cette dernière éprouve depuis la tête jusqu’au foie. Pour l’odorat, le goût, le toucher, il n’en a point parlé, non plus qu’il n’a examiné s’il n’y avait pas quelque autre sensation ; c’est surtout sur les objets sensibles qu’il s’est étendu.

7. Empédocle dit une même chose de tous les sens, à savoir que la sensation se fait par adaptation aux pores de chaque sens particulier ; c’est pourquoi l’un ne peut juger des objets de l’autre, les pores étant soit trop larges, soit trop étroits pour l’objet à sentir, qui alors ou bien les traverse sans les toucher, ou bien ne peut aucunement s’y introduire.