Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/304

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cause, cela signifie qu’il est le confluent de plusieurs causes, la combinaison de plusieurs répétitions partielles. La cause et la fin forment-elles une opposition ? Pas davantage : elles forment une adaptation. La finalité, c’est l’emploi de la causalité ; je bois pour me désaltérer parce que je sais que boire désaltère. Le rapport de moyen à fin n’est que celui de cause à effet. Ce dernier, il est vrai, à l’air de se reproduire dans le premier en s’y renversant, mais cette apparence tient à ce que l’effet, en tant que fin, est conçu avant sa cause, dont il réveille l’idée, ce qui n’empêche pas la cause-moyen d’être conçue comme antérieure à l’effet-fin.

C’est donc se laisser prendre au leurre métaphysique de la symétrie que de mettre sur le même rang, en deux catégories affrontées et contraires, les principes de causalité et de finalité. J’en dirai autant de la corrélation entre la cause et la substance, où se reproduit extériorisée (comme dans celle du temps et de l’espace, quoique sous de nouvelles formes), la dualité interne du désir et de la croyance, qui, nous le savons, ne s’opposent pas. D’autre part, la substance et le phénomène ne s’opposent pas plus que la cause et l’effet : le phénomène, c’est l’apparence, le portrait, la répétition plus ou moins exacte de la substance, comme l’effet la répétition de la cause.


Voici comment peut s’expliquer la formation de ces deux couples de rapports. Avant tout, il faut qu’une chose, pour être une chose, entre dans un jugement. Elle est, non pas, comme le disait Mill, une possibilité de sensations, mais une possibilité de jugements. Elle n’est jugée réelle que comme justiciable de l’esprit. Mais un jugement suppose