Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/390

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été par elles-mêmes stériles en véritables perfectionnements. Dans l’ardeur de la lutte, patrons et ouvriers, armés les uns contre les autres, ont bien pu imaginer de ressusciter des procédés anciens, de faire revivre des espèces démodées et inférieures de production ; mais inventer du nouveau, et du nouveau viable, jamais. C’est au cours du travail, à l’atelier, c’est durant le fonctionnement de la coopération harmonieuse entre le patron et ses ouvriers (ou entre ceux-ci seulement, s’il s’agit d’une société coopérative), que les bonnes idées jaillissent, que les améliorations naissent et s’accumulent. Loin de susciter de nouvelles inventions, les grèves ont maintes fois eu pour objet la destruction des machines rénovatrices.

Tout autrement fécondes que les grèves, sont les Trade-Unions et autres associations ouvrières ou même patronales. Une des raisons qui ont porté M. Godin à fonder son familistère est qu’il pensait, dit M. Paul Leroy-Beaulieu, « que la participation induirait les ouvriers à inventer de nouveaux instruments, de nouvelles applications, de nouvelles méthodes. » Et il paraît que cet espoir n’a pas été déçu. — Mais peut-être m’objectera-t-on que les Trade-Unions et, en général, toutes les corporations industrielles sont nées des nécessités de la lutte et pour l’entretenir - pour entretenir les grèves en particulier - et qu’il en a été en cela de ces corps collectifs comme des organismes, qui seraient nés, suivant les Darwiniens, de la concurrence vitale et pour la concurrence vitale. Mais, là comme ici, on a fait honneur à la lutte des bienfaits de l’alliance. D’abord, les Trade-Unions sont à la fois des sociétés de secours mutuels et des armées,