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Citer les vers de M. Évanturel, c’est les critiquer. Si l’espace me le permettait, je reproduirais tout le volume, sans commentaire, et j’aurais vengé le bon sens outragé dans chaque ligne. Mais il y a des degrés partout, même dans la bêtise ; je me bornerai par conséquent aux morceaux les plus ineptes.

M. Évanturel commence par les quatre saisons, qu’il habille les unes après les autres. Le printemps porte une cravate de soleil, avril tient un parasol à la main et mai, qui le suit par derrière, a une rose à la boutonnière ; juillet est coiffé d’un chapeau de paille et.

Le blé promet, la fraise est mûre,
Quand vient le soir, tant l’air est bon,
La lune en quête d’aventure
Se promène sur son balcon.

Parlant de l’automne, le poète fait des révélations saisissantes, startling, comme disent les Anglais.

Les nuits sont froides ; — l’on s’enrhume ;
Soir et matin le ciel est noir.
Les nuits sont froides ; — le toit fume ;
La boue encadre le trottoir.

Après avoir cité ces vers, M. Napoléon Legendre, membre actif de la société d’admiration mutuelle, s’exprime comme suit :

Voici, à mon avis, quelque chose qui sort de l’ordinaire et du commun. Les pensées sont neuves et habillées dans un langage élégant. Le vers est bien fait et l’idée y est à l’aise.

Ainsi, dire qu’en automne l’on s’enrhume et que la boue encadre le trottoir, c’est formuler des pensées neuves, c’est sortir de l’ordinaire et du commun. M. Legendre a bien fait de le dire, car personne ne s’en serait douté. Mais en y réfléchissant un peu, ou se convaincra qu’il y a là réellement du neuf et de l’extraordinaire : C’est de voir qu’il existe des hommes capa-