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À la politique ? Oh ! non ! Vous appelez cela de la politique, ce sentiment vrai, puissant, sincère, qui fait aimer son foyer, son sol natal, sa race ! qui vous fait désirer de voir tout cela libre et grand ? Oh ! détrompez-vous, monsieur ! La politique et l’amour du pays sont deux choses bien différentes. Jérémie ne faisait pas de politique lorsqu’il pleurait sur les ruines de Jérusalem. Léonidas et ses trois cents Spartiates ne faisaient pas de la politique lorsqu’ils se faisaient écraser aux Thermopyles pour défendre le sol sacré de la patrie… Et Beaurepaire, faisait-il de la politique lorsqu’il se brûlait la cervelle plutôt que de signer la capitulation de Verdun…

J’épargne au lecteur le reste de la tirade. Et M. Fréchette veut faire croire au monde que le sol canadien produit de telles merveilles pédagogiques ! Oh non ! On en trouve peut-être à Boston, mais nulle part ailleurs sur ce continent.

Ce qu’il y a de plus étonnant, c’est que ce caquetage scientifique ne dégoûte pas Hastings. À peine Rose a-t-elle débité cette harangue, que le jeune Anglais la demande en mariage. Pour moi, j’aimerais cent fois mieux m’ensevelir vivant dans les sables du Sahara ou dans les glaces du Groënland que d’épouser une femme qui me parlerait de Léonidas et de ses trois cents Spartiates.

M. Fréchette appelle cette jeune fille : La sainte, et elle admire le suicide ; elle bat les campagnes à toute heure de la nuit avec n’importe qui ; elle « tire du pistolet » ; elle chante la Marseillaise la carabine à la main, et fait cent autres extravagances. Excentrique, oui ; sainte, jamais.

Je crois pouvoir résumer comme suit cette étude sur Papineau : Le drame de M. Fréchette a pour but de glorifier des événements et de réhabiliter un homme que les gens bien pensants ne peuvent pas admirer ; il n’est pas du tout conforme à la vérité historique ; et comme simple œuvre d’art il est d’une très faible exécution.[1]

  1. Cette critique valut à M. Tardivel une explosion de haine dans les colonnes de la Patrie, numéro du 31 juillet 1880. Voici un échantillon de cette prose libérale :

    « Quel brave garçon ! quel sympathique écrivain ! quel charitable confrère que ce M. Tardivel.

    « C’est le modèle des journalistes réactionnaires militants !

    « Un vrai petit Veuillot, quoi !

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    « C’est écœurant, voilà tout ; et si M. Tardivel a ou l’intention de donner le haut-le-cœur à ses lecteurs, il a parfaitement réussi.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    « Il faut que l’homme soit fou on qu’il soit bien bêtement méchant.

    « J’aime mieux croire à la folie, en attendant le retour de Fréchette qui n’a pas besoin de moi pour régler ses comptes.

    « M. Tardivel ne perd rien pour attendre ! »

    M. Tardivel profite de cette occasion pour faire remarquer à la Patrie qu’il attend toujours.