Page:Tardivel - Pour la patrie, 1895.djvu/222

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
221
POUR LA PATRIE

où l’on ne rencontre point d’obstacles, point de contradictions, où l’on marche sans fatigue, entouré de délices et de voluptés ; l’autre, étroit, rude, montueux, difficile, où l’on n’avance qu’avec peine et misère, tombant souvent, se blessant souvent aux aspérités du sol. Inutile de chercher une troisième route à travers la vie, il n’y en a pas, puisque pour l’homme il n’y a que deux éternités, une éternité de bonheur à laquelle conduit la voie étroite, une éternité de malheur à laquelle aboutit la voie large et facile.

Pendant plus d’une demi-heure le Père Grandmont développe ces fortes et salutaires pensées, et Ducoudray l’écoute de plus en plus grave et recueilli, la tête penchée sur sa poitrine. Du coin obscur où il se tient, l’étranger aux lunettes sombres ne perd pas le moindre mouvement que fait le journaliste.

Le Père Grandmont paraissait avoir fini son sermon ; il se préparait même à descendre de la chaire, lorsque, tout à coup, se retournant vivement vers l’auditoire, la figure illuminée par une subite inspiration, il s’écria :

— Mes frères, s’il y a parmi vous quelqu’un qui gémit sous le poids d’une montagne de