Page:Tardivel - Pour la patrie, 1895.djvu/317

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
316
POUR LA PATRIE

mortelle. Arrivé à son logement, après la séance, il s’en ouvrit à Leverdier.

— Mon cher, dit-il, prie pour moi comme tu n’as jamais prié, car je suis tenté comme je ne l’ai jamais été. C’est que l’orgueil, l’amour propre est le sentiment le plus difficile à vaincre que connaisse le pauvre cœur humain. L’idée que je vais peut-être passer aux yeux de mes compatriotes pour un insensé qui devrait être à la Longue-Pointe, m’épouvante horriblement. Notre divin Sauveur a été traité de fou par Hérode et sa cour. Qu’Il m’accorde la grâce d’accepter cette humiliation en union avec Lui !

— C’est une position terrible, en effet, fit Leverdier, et tu as toutes mes sympathies. Si, en partageant ta douleur, je pouvais diminuer tes souffrances !

— Merci ! mon ami, merci ! Sais-tu à quelle tentation je crains de succomber ?

— Non, pas du tout, à moins que ce ne soit à une sorte de désespoir.

— Je crains qu’au dernier moment, me voyant acculé au pied du mur et obligé de choisir entre le ridicule et l’abus de confiance, je n’aie la faiblesse d’opter pour ce dernier en