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LE CHEMIN DE FER

neige. Voilà encore une économie énorme en faveur de notre route.

Le chemin américain traverse, entre autres régions incultes, un désert de 300 milles, où, dit M. Rodolphe Lindau[1], les travailleurs ne pouvaient trouver une goutte d’eau, où il fallait creuser des puits artésiens ou pratiquer des rigoles communiquant avec des cours d’eau torrentiels souvent éloignés de plusieurs milles. La ligne du Pacifique du Nord américain que l’on est à construire traverse également une vaste région sablonneuse. Nous avons déjà établi la supériorité de notre route sous ce rapport.

De plus, la compagnie du Pacifique Central a éprouvé de grandes pertes et beaucoup de difficultés de la part des sauvages. Tel était l’acharnement des indiens contre les ouvriers terrassiers, que ceux-ci étaient forcés de travailler avec leurs armes chargées à portée de la main. Les enfants des bois s’opposaient par tous les moyens possibles à l’empiétement de la civilisation sur leurs domaines. Un jour, ils scalpaient quelques travailleurs isolés, une autre fois ils livraient des combats sanglants à des brigades entières de travailleurs, ou ils faisaient dérailler des trains lancés à toute vapeur. Au mois d’octobre 1868, le train fut ainsi jeté hors de la voie trois fois en douze jours.

La Compagnie du Pacifique du nord n’est pas plus favorisée à cet égard. Le gouvernement ayant, dans la subvention en terres qu’il lui a octroyée, donné une réserve qui appartenait aux sauvages, ceux-ci sont devenus furieux et ils s’opposent à main armée au progrès de la ligue. Les États-Unis paient bien cher la manière arbitraire et cruelle avec laquelle ils ont traité leurs sauvages.

Comme la politique des gouvernements anglais et canadien, à l’égard de nos indiens, a été tout empreinte de bienveillance et de modération, nous n’avons pas à craindre de procédés de ce genre. Les indigènes de l’ouest ont, au contraire, rendu les plus grands services comme éclaireurs aux explorateurs de notre route. C’est ce que constate le rapport préliminaire de l’exploration de la ligne signé par M. Sandford Fleeming : « Les indiens se sont montrés très bienveillants chaque fois que la nature et le but des diverses expéditions leur ont été expliqués. Beaucoup d’entre eux ont rendu de diverses manières des services importants aux explorateurs. »

Ces faits incontestables démontrent amplement qu’en comparant les lignes américaine et canadienne, on ne peut manquer d’arriver à la conclusion que notre Pacifique se construira à beaucoup moins de frais.

  1. De l’Atlantique au Pacifique.