Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/121

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prie. » Nous la suivons ; par des corridors noirs et étroits, nous arrivons à la salle de bains… « C’est tout ce que vous avez ? lui dit mon maître. — Oui, répondit-elle. » Vivement mon maître la remercia et elle nous conduisit jusqu’à la sortie. Heureusement, car nous n’aurions jamais pu retrouver notre chemin.

Dehors, Monsieur se mit à respirer très fort, humant l’air et regardant au loin avec ténacité, comme quelqu’un qui aurait été privé d’air et de lumière depuis longtemps.

« Ne trouvez-vous pas, me dit-il, que c’est hideux, ce que nous venons de voir ? Mais c’est répugnant de saleté et d’aspect épouvantable. Ces baignoires ressemblent absolument à des sarcophages, elles sont toutes ébréchées et cassées. Elles ont juste la profondeur pour recevoir un corps humain. Puis, ces sortes de stalles, éclairées par ce petit hublot, vous font penser aux anciens cachots. Oh ! non, ma bonne dame, je ne serai pas votre client, vous ne me reverrez jamais ici… »

Il ajouta : « C’est une Maltaise, cette femme, d’un type intéressant, je ne suis pas fâché de l’avoir vue. »

Après avoir retraversé le passage à niveau, nous croisons une vieille calèche 1830. M. de Maupassant reconnaît dans l’intérieur le fils du bey de Tunis. Nous marchons alors très vite, comme des gens qui ont déjà perdu trop de temps. À peine avons-nous le loisir de remarquer l’entrée de la ville, une grande porte ouverte en plein ciel, à côté de laquelle gisent des monticules de terre, qui sont, paraît-il, ce qui reste des fortifications. Pas un arbre, c’est nu, sec et triste.

Le même jour, en rentrant à 7 heures du soir, mon maître me dit :

« Préparez-moi de suite mon sac, avec le nécessaire