Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/135

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Dans l’après-midi, mon maître alla faire une promenade qui lui fit vite oublier les petits ennuis de la matinée. Il rentra avec son bon air de gaîté, en disant : « Quel temps superbe, les champs d’immortelles inondés de soleil, sont éblouissants ! »

Le lendemain, au petit jour, le Bel-Ami, après avoir franchi l’étroit chenal de Cassis, lançait résolument son avant dans la mer, le cap vers le large. Il avait assez belle allure, le temps s’annonçait bien, nous avions une bonne brise fraîche qui nous réconfortait. Le temps ne se démentit pas, cette journée fut belle à plaisir, pour notre navigation.

Aussi, à 2 heures, le Bel-Ami était-il mouillé dans le port de la petite baie de Porquerolles. M. de Maupassant en veston, coiffé de son chapeau gris et armé de sa canne à pic, partit aussitôt pour explorer ce coin de terre perdu. Raymond et moi, nous nous mîmes à la recherche d’eau douce. Sur notre chemin, j’aperçus dans un potager des choux-fleurs magnifiques, je demandai à la ménagère de vouloir bien m’en céder deux, ce qu’elle fit de bonne grâce, et tout heureux, comme si nous avions fait une trouvaille inespérée, nous regagnâmes le bord.

En rentrant le soir, mon maître s’informa de notre promenade et demanda si nous avions trouvé de l’eau douce. « Oui, répondit Raymond, et mieux encore ; François a trouvé de superbes choux-fleurs, du lait et de la crème. »

Je descendis au salon. Monsieur me dit : « Il paraît que vous avez trouvé des provisions ? — Oui, Monsieur. — Eh bien, moi aussi, j’ai trouvé un excellent sujet de chronique. Il n’y a qu’à moi que ces choses surprenantes arrivent ! Je suis parti d’ici tantôt avec l’intention de