Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/163

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diable de bahut hollandais est bien lourd. Tant pis, il faut qu’il danse comme les autres ! Cela amuse tant Monsieur ! Ce matin-là, au plus fort de notre travail, il me confia ses préférences :

« Si j’étais riche, j’aurais une grande maison dans un joli site très retiré. Je la remplirais de toutes sortes de jolies choses, d’objets rares qui me plairaient ; je ne me lasserais pas de les regarder. Ce serait pour moi l’idéal de vivre dans un calme parfait, de passer mes journées entières à contempler ce qui me ferait plaisir, loin de ce train mondain qui me fatigue tant, que je suis obligé de suivre et que je déteste. »

Les jours suivants, je passai tous ces meubles à une solution au sublimé pour détruire un insecte presque invisible qui les rongeait, puis la cire et la brosse eurent leur tour…

Fort comme la mort marche bien ; il doit être fini au 15 janvier, afin de paraître dans un journal et, dès le printemps, il verra le jour en librairie. Mon maître dit que le succès n’est pas douteux, mais la fin ne plaît toujours pas à Madame.


Fin décembre. — Le Bel-Ami est au port de Cannes ; mon maître fait des promenades en mer.

Il y a déjà du monde à Cannes et toujours beaucoup d’altesses. Hier, un duc est venu nous rendre visite. Je ne le connaissais pas, cet homme… je le reçus poliment, mais comme tout le monde… Le soir, quand je remis sa carte à mon maître, il me demanda comment je l’avais appelé. Je lui dis que je l’avais appelé monsieur. Alors il m’ordonna à l’avenir de lui donner du monseigneur, ainsi qu’à tous les ducs et altesses. Je promis de faire mon possible pour mettre en pratique ses recomman-