Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/181

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bons vieux parents, encore surchargés de jeunes enfants ou souvent infirmes !

« J’aurais, certes, trouvé beaucoup mieux que M. Zola mît en relief l’honnêteté, le dévouement des domestiques, les épreuves qu’ils ont souvent à supporter ; car il ne faut pas, dans la plupart des maisons, avoir de caractère, il faut toujours s’effacer ; si l’on vous humilie, ne pas avoir l’air de s’en apercevoir. Le travail est souvent dur, sans réconfort ni encouragement, car on est séparé de ses parents ; tout cela et beaucoup d’autres détails auraient offert un meilleur sujet d’étude à ce M. Zola et, certes, cela se rencontre plus souvent que les histoires dégoûtantes qu’il a racontées et qu’il a certainement inventées, car il n’est pas dans le vrai, il n’a pas vu ce qu’il a écrit. Cela n’existe pas et, sûrement, je ne suis pas le seul à penser qu’il faut avoir en soi-même des pensées viles et malsaines pour faire sortir de son cerveau des choses aussi répugnantes qui, je le répète, n’ont jamais existé. »

Je me démenais comme un beau diable, j’en avais chaud. M. de Maupassant souriait, de temps en temps il hochait la tête, frappait plus ou moins fort la terre avec sa canne. Enfin il me dit :

« Croyez, François, que Zola n’a pas voulu atteindre ces braves filles dont vous me parlez si bien. Il a voulu seulement montrer dans cette classe de la société le côté défectueux. Son œuvre est très bien, mais, comme toujours, il a cherché un grand effet pour la vente. S’il avait écrit dans le sens de ce que vous venez de dire, il n’aurait rien vendu, tandis qu’avec ce qu’il a fait, tous les appétits malsains vont se jeter sur ses livres, ce sera une curée, et l’argent, qui était tout ce qu’il visait, affluera. C’est, selon moi, un tort, car pour qu’un artiste donne