Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/237

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Un matin que mon maître faisait les cent pas d’un bout à l’autre de son appartement, il vint me trouver dans la salle à manger et me dit : « J’ai des douleurs dans les jointures. À partir de demain, je commencerai une série de bains de vapeur. Je vous prie de tout tenir prêt. » Après en avoir pris trois ou quatre, et quoique nous ayons écourté l’opération au point de ramener le bain à dix minutes, Monsieur dut cesser ce genre de réactif. Il n’était pas depuis cinq minutes dans son fauteuil, qu’en un clin d’œil tout le sang lui montait à la tête. Il le reconnut et, pour éviter la congestion, il se remit à prendre sa douche simple, toujours, bien entendu, suivie de frictions sur tout le corps au gant de crin humecté d’eau de Cologne.


Notre Cœur est terminé ; mon maître l’a donné à la Revue des Deux Mondes pour une première publication. Il me prévient que M. Koning, directeur du Gymnase, viendra un de ces matins…

Après cette visite, pendant laquelle j’avais entendu la forte voix de commandement de ce monsieur, mon maître me raconta ce que ce directeur de théâtre était venu faire à la maison : « Il m’a demandé de bien vouloir lui refaire totalement, selon ma manière de voir et aussi un peu d’après ses données à lui, le manuscrit d’une petite pièce que M. X… a tirée d’une de mes nouvelles. La chose me paraît très facile ; il me donne un mois pour ce travail, mais je lui ai fixé rendez-vous ici dans quinze jours et ce sera fait. »

Ce monsieur fut exact à venir prendre le manuscrit, qu’il lut à haute voix avant de l’emporter. Quelle voix ! Je n’en avais jamais entendu de si forte. À certains passages, qu’il trouvait réussis, il criait et laissait entendre