Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/26

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rhum, je le remontai en lui disant que le plus dur était fait ; et quand, une heure après, nous entrâmes dans le port, Galice ne cachait pas sa joie. Il n’aura plus maintenant qu’à garder la Louisette bien ancrée derrière le môle. »


Paris. — Mon maître n’est pas content. Aujourd’hui, 3 mars, il fait ici un froid de loup et la neige tombe à gros flocons, rendant les rues impraticables aux piétons. Comme Monsieur n’aime pas la voiture, il sort peu. Il en profite pour faire quelques chroniques et mettre au point les dernières épreuves de son livre.

Vers le 20, le temps s’améliore, il s’occupe de son nouvel appartement, avec son tapissier. Ils décident de faire la salle à manger d’un rouge grenat, le salon bleu Louis XVI, la chambre à coucher jaune et le jardin d’hiver vert olive… On achète aussitôt des étoffes.

Le 2 avril, veille du déménagement, nous emballons les objets précieux, les assiettes, les plats en vieux Rouen, les livres anciens.

Le 3 avril, rue Montchanin, le tapissier Kakléter est là, avec deux ouvriers ; les sacs sont défaits, on déroule les étoffes. Mon maître est tout joyeux. Trois hommes à faire travailler, quelle fête ! Kakléter avec son client entreprennent le salon ; en trois jours, tentures et rideaux sont posés. Pendant trois semaines, M. de Maupassant travaille avec acharnement à cette installation, ne perdant qu’un après-midi par-ci par-là. La plupart des objets occupèrent plusieurs places avant d’en trouver une définitive. Deux têtes d’anges joufflus en bois massif qui symbolisaient les Dieux du vent furent celles qui se