Page:Tassart - Souvenirs sur Guy de Maupassant, 1911.djvu/282

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court vers l’endroit d’où partent les cris de ces pauvres bêtes. Je le suis, et nous voyons, sur le bord du sentier mal tracé, un renard qui fuit à fond de train, emportant une poule. Mon maître regrette de n’avoir pas son fusil…

Nous arrivons au pont des Romains ; nous admirons la majesté des travaux dont ils ont doté cette partie de la France. Pour y monter, on a le choix entre plusieurs sentiers tortueux. Je m’engage dans l’un d’eux, porteur de l’appareil photographique, des plaques de réserve et d’une longue-vue ; j’arrive à la plate-forme avant mon maître, qui avait pris sans doute un sentier plus difficile. Lorsqu’il s’aperçoit que j’avais de l’avance sur lui, il fait un effort visible pour franchir cette crête, peu facile à vrai dire. Il prend un cliché du pont, du côté de la passerelle Louis XIV, puis nous allons d’un bout à l’autre de l’étroit couloir, qui se trouve au sommet du pont reliant les deux rives sauvages de ce torrent. De là, on domine les bois des environs. En ce moment, ce que me dit mon maître est des plus intéressant. Il me cite les épisodes dont ce pont fut le théâtre, vers la fin du quatrième siècle, aussitôt qu’il fut construit ; puis il me vante l’utilité de cet aqueduc pour amener les eaux prises à la source d’Eure à Nîmes.

« Quelle leçon ! disait-il ; les Romains ignoraient l’impossible, quand il s’agissait de la santé publique. Outre leurs travaux prodigieux, partout ils installaient des thermes où l’on se baignait gratuitement. Ah ! certes, ils étaient pratiques à ce point de vue ! Il est triste de constater que cette bonne habitude qu’ils nous avaient indiquée de nous régénérer par l’eau se soit perdue, car notre race y eût beaucoup gagné. »

Nous passons une demi-journée à Cette, puis nous