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LA NEIGE.


Si peu nombreux encor, tes jours coulent bien sombres,
Jeune année ! et ton front est enveloppé d’ombres.
De ces nuages noirs, qui déguisent les cieux,
Descendent les frimas à flots silencieux.
Comme le froid chagrin sur une âme oppressée,
La neige sur le sol tombe lente et glacée.
Dans mes yeux abattus je sens rouler des pleurs !
Hélas ! mon cher pays, qu’as-tu fait de tes fleurs ?
Quel sinistre pouvoir a flétri ta parure ?
En vain mon cœur gémit et ma bouche murmure ;
Demain, hélas ! demain, de ses blancs tourbillons
La neige aura comblé tes fertiles sillons ;
Les oiseaux, que la bise atteint dans leurs retraites,
Demain s’exileront de tes forêts muettes ;
Demain ces flots nombreux qui, dans leur liberté,
Te vont porter la vie et la fécondité,
S’arrêteront captifs, et ce réseau de glace
Comme un voile de mort couvrira ta surface !