Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/383

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simples et naïfs, ne nourrissant nullement des sentiments d’hostilité à l’égard de l’Église. C’est ainsi que, dans les loges non secrètes d’Odd-Fellows, on rencontre des protestants aucunement sectaires et même pas mal de catholiques. Ces recrues se laissent entraîner, ne voient dans l’institution qu’une société de camaraderie et de délassement, absolument inoffensive, et y demeurent le plus souvent jusqu’à la mort, sans se douter jamais qu’ils appartiennent à une branche de la franc-maçonnerie et à une de ses pires branches. Ils fraternisent avec Durand et Martin, qui ont l’air de simples sceptiques, indifférents aux questions religieuses, et qui, appartenant à la seconde classe sous les pseudonymes de Christ-Moque et de Satanophile, par exemple, disent la messe noire et poignardent des hosties consacrées.

Ces protestants non sectaires et ces catholiques naïfs sont nécessaires aux vrais Odd-Fellows, pour empêcher de soupçonner les infamies qui se commettent dans la classe supérieure de l’Ordre ; mais, d’autre part, ils sont trop éloignés de l’anticléricalisme moyen de la maçonnerie ordinaire pour être accueillis en visiteurs par les loges des Rites Écossais, de Royale-Arche, de Swedenborg, de Misraïm et autres. Et les parfaits initiés, les Odd-Fellows de la seconde classe, ne peuvent, à leur tour, avouer leur secret aux ateliers symboliques ni même aux chapitres de Rose-Croix ; car ce serait mettre sur la voie de la constatation d’existence d’une haute-maçonnerie ; aussi, ceux-ci se bornent-ils, en tant que visiteurs, à se présenter aux triangles, aux adeptes du fakirisme ou de la San-ho-hoeï.

Cette question de l’admission des Odd-Fellows comme visiteurs dans les loges maçonniques est toujours vivement controversée, quand l’occasion se présente en discussion. Pourtant, l’Ordre travaille fort activement à la déchristianisation des peuples ; l’alliance avec Albert Pike (aujourd’hui avec Adriano Lemmi) est complète ; les ateliers de la première classe, par ce mélange perfidement calculé de lucifériens masqués, de protestants honnêtes et de catholiques naïfs, détachent peu à peu ces derniers des pratiques religieuses et amènent doucement les autres à l’anticléricalisme.

Un rapport du F∴ Kappus, membre de la Grande Loge Eclectique de Francfort-sur-le-Mein, dont il fut donné lecture au cercle maçonnique intitulé les Clairières de la Forêt-Noire, fondé à Seckingen, sous la direction de la loge constituée à Freybourg, reconnaissait qu’en 1873, dans le Maryland-Sud, le comité d’instruction des Odd-Fellows exerçait sa surveillance sur 2.744 pauvres enfants auxquels on inculquait la doctrine luciférienne.

À la tenue du 10 septembre 1874, de la Grande Loge dite aux Trois-Globes, orient de Berlin, le F∴ von Etzel, après discussion, soumettait à l’assemblée la motion suivante qui fut adoptée :

« Les Odd-Fellows n’étant pas considérés comme formant des sociétés secrètes et ne poursuivant qu’un but humanitaire (toujours le même