Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/422

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est le plus abominable chantage, est pratiqué dans l’Illinois, au temple maçonnique de Chicago : les francs-maçons ont établi là (on ne le croira pas peut-être !) une clinique spéciale pour les maladies honteuses ; les femmes qui s’adressent à cette clinique sont soignées avec toute la discrétion nécessaire, par un traitement soi-disant magique, nommé le « Remède Magique du F∴ Cook ; » on arrive ainsi à connaître ce dont un homme, à plus forte raison une femme, ne voudra jamais à aucun prix être soupçonné ; puis, parmi les guéries, dont on possède le secret le plus inavouable qui soit au monde, on fait un choix[1].

Le vote sur l’admission d’une sœur s’effectue à l’unanimité ; frères et sœur de la loge prennent part au scrutin. Pour l’admission d’un frère, l’unanimité des votants est également nécessaire ; mais les sœurs de la loge ont seules droit de suffrage : c’est en ceci que les maçonnes sont maîtresses d’appeler qui leur convient à la fréquentation de l’atelier androgyne, et c’est ce qui me faisait dire tout à l’heure que les Thersite et les Quasimodo sont écartés de ces réunions.

La loge-annexe se crée donc à l’insu de la plupart des membres de la loge-souche (atelier exclusivement masculin). Comment s’augmente-t-elle en frères ? Il est temps de le dire, maintenant que nous savons comment s’opère le recrutement des sœurs.

Les maçonnes de simple étiquette, les pseudo-sœurs, ainsi que je les ai qualifiées plus haut, vont jouer leur rôle, sans le savoir.

Celles-ci sont les femmes, les parentes des francs-maçons, celles à qui, sans initiation, on a débité un compliment et remis un cordon de parade, mais qui n’ont pas la jarretière symbolique. Ce sont, en général, des honnêtes femmes, au point de vue de la moralité et de la probité ; quant à la religion elles la tiennent, d’ordinaire, en parfaite indifférence ; leurs maris sectaires les ont peu à peu détournées de la fréquentation des sacrements.

On leur a dit : « Vous êtes maçonnes » ; et elles croient l’être. On les invite à des fêtes, à des tenues blanches, à des banquets ; et elles y viennent. Lorsque, dans le monde profane, on parle devant elles de la franc-maçonnerie elles en font l’éloge : « J’en suis ; je suis reçue au temple maçonnique, où mon mari et ses amis ont leurs assemblées ; ils discutent entre eux les questions du jour ; ils examinent les moyens qui peuvent être les meilleurs pour la propagande de leurs idées ; ce sont des hommes de progrès ; je suis fière d’être de leur société ! » Tel est leur langage.

Survient un anniversaire à célébrer ; s’il n’y a pas d’anniversaire, on a

  1. Cette révélation rencontrera certainement des incrédules : je m’y attends. J’invite donc ceux qui douteraient à se procurer les journaux de l’Illinois contenant les infâmes annonces de cette clinique et autres réclames servant d’amorces. Je signale notamment le n° du The Drovers Journal, en date du mardi 12 septembre 1893.