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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 2.djvu/135

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« Par mon œuvre, je suis le doyen de la Magie contemporaine, absente avant 1881 de la culture française : par mon nom et mon Verbe, j’appartiens à la race sacrée des Kaldéens. »


Le Sar Péladan ne pèche pas par humilité ; son péché, celui dont il se vante, est celui de Samas, le héros d’un de ses livres, l’Androgyne, sous les traits duquel il a peint son enfance et sa puberté : l’orgueil. C’est du reste, d’après lui, le péché de Dieu : « Dieu n’a créé que par conséquence d’orgueil ; l’homme ne monte que par la conséquence de sa parcelle divine, par l’initiation de Dieu. »

Sur son père et sur son frère, Joséphin a fait des révélations ; mais jusqu’à quel point faut-il se fier à ses dires ?… Il a fait l’oraison funèbre de l’un et de l’autre.


I. Oraison funèbre du Chevalier Adrien Péladan, 1890.

(Elle parut d’abord sous forme de Mandement de Joséphin Péladan aux abonnés et aux lecteurs des Annales du Surnaturel.

« Le connétable Barbey d’Aurevilly, le maître du temple Villiers de l’Isle-Adam, ces deux chefs du catholicisme indépendant, par la mort touchés, ont laissé tomber en mes mains le commandement du tiers-ordre intellectuel, et je serais ici comme nécrologue de l’Aristie, si je n’y venais pas en fils dolent et apologiste.

« Le chevalier Péladan fut cet ouvrier de la vie qui criait au crépuscule : « Seigneur, depuis l’aube, je sème et me voici las, quelle sera ma moisson ? »…

« En vain, remontant jusqu’à l’occupation du midi de la France, par les Gars d’Asie, découvrant dans un patronymique deux noms de dieux Kaldéens et celui d’un roi d’Assur, nous viendrions déterminer ainsi la raison d’un zèle précoce. En 1815, il n’y avait au Vigan ni Faust, ni Hélène, et cependant un Euphorion y naquit ; ce nom porté inconsciemment par d’honorables chrétiens et des chevaliers de Saint-Louis, ne prend du sens que sur le jeune Adrien, qui fut un vivant anachronisme promenant les allures d’un nabi d’Israël, au milieu du scepticisme étonné de ce temps… Cet éphèbe pieux quittera son vallon malgré tous, et après s’être fait armer chevalier par Grégoire XVI, ira de Paris à Lyon et de Lille à Nîmes faire l’œuvre de Dieu, par la parole et par le livre, effaçant de son zèle de feu celui beaucoup trop calme du clergé. Vocatus est ! je ne puis dire que cela ; sinon, ouvrant le Zohar, j’en tirerais une lumière qui éclaire le Bereschit et le mystère des vocations, mais vous n’êtes pas initiés… et je vous scandaliserais en offusquant vos yeux de fidèles de la clarté propre aux hiérophantes.

« Du jouvenceau passionné pour Dieu seulement, jaillit le chevalier-prêtre du xiiie siècle, comme apparaît plus tard le nabi israélite. Fait chevalier de l’Éperon d’or et de Saint-Sylvestre par le Pape, reçu avec honneur à l’Académie des Arcades sous le vocable d’Eulogio Cleoneuse, il revint tout radieux d’ardeur et de charité.

« Deux désirs l’obsédaient encore : Ierouschalaïm, et puis fléchir le genou dans toutes les cathédrales de France : mais voici qu’une inespérance se