Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 2.djvu/335

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qu’on ignore généralement, c’est que son cadavre fut transporté à Charleston. Les collègues du père de Sophia, membres du Sérénissime Grand Collège, tinrent à ce qu’il fût inhumé dans les caveaux du Vatican luciférien, au-dessous du Sanctum Regnum.

Les palladistes affirment que le vieux Walder a revécu onze fois après sa mort. Le cadavre était apporté dans sa bière, à une tenue de grand triangle. On le sortait du cercueil pour l’installer au trône du grand-maitre ; il présidait la séance, prononçait les allocutions habituelles, tout comme s’il eût été un homme vivant. La onzième fois, il déclara que c’était la dernière et qu’il fallait désormais le laisser dans son tombeau. Les frères servants le remportèrent, et il fut enterré définitivement. Auparavant, au cours d’une de ces assemblées macabres, il avait prôné l’élection de Lemmi, en un discours très enthousiaste, et dit qu’il ne fallait pas revenir sur les faits accomplis ; car le Dieu-Bon en était fort satisfait.

La neuvième de ces tenues de grand-rite eut lieu en cène triangulaire, C’est dire que Satan, dans son orgueil suprême, voulait s’attribuer au plus haut point la toute-puissance divine, aux yeux de ses adorateurs fanatiques.

En effet, le pouvoir de ressusciter les morts n’a jamais été toléré au diable. Sur ce point, tous les théologiens catholiques sont d’accord, et cela se comprend sans peine. C’est par la mort que l’homme franchit le seuil du tribunal de Dieu, et Dieu porte alors son jugement pour l’éternité : l’homme, ayant terminé sa vie, est à jamais damné, s’il est mort en état de péché mortel ; s’il n’a que des fautes vénielles à expier, il va pour un certain temps en purgatoire, mais il est néanmoins destiné au ciel ; ou bien, s’il est mort en parfait état de grâce, Dieu l’admet immédiatement au nombre des élus. Voilà ce que l’Église infaillible nous enseigne. Or, ressusciter un mort serait lui permettre d’avoir une seconde vie terrestre, ne fût-elle que de quelques jours ; il est bien évident qu’il y a impossibilité absolue, pour Satan, de faire cela : le jugement de Dieu étant définitif, Satan ne peut pas donner à un homme qui a bien mérité l’occasion de succomber au cours d’une seconde existence ni à un damné le moyen de gagner le ciel qu’il avait d’abord perdu. Cela est clair comme le jour : à ce point de vue, il est permis de dire que par la mort c’est fini et bien fini pour l’homme ; la sentence divine est

    soixante-dix ans, après son retour d’un voyage en Italie. Il avait une réputation en Europe et en Amérique comme représentant du spiritisme, et il était aussi bien connu comme l’ami de John Taylor, le successeur de Brigham Young ; c’est en qualité de disciple de ce dernier qu’il fit tant pour la propagation des doctrines du mormonisme. On ne doit pas oublier qu’il était également un occultiste de l’école d’Éliphas Lévi. »
    Je ferai remarquer, en passant, que le journal cité par M. De la Rive ne fait aucune allusion au palladisme du défunt, ou, pour mieux dire, qu’il l’appelle tout simplement « spiritisme ». Mais il y a spiritisme et spiritisme, comme il y a fagots et fagots ; c’est ainsi que le luciférianisme déclaré ne fut pas représenté officiellement au Congrès international spirite tenu à Paris en 1889, et, si les palladistes s’abstinrent en cette occasion, ce n’est pas uniquement parce que le Congrès siégeait au Grand Orient de France (excommunié par Albert Pike).