Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/143

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geonna la momie des pieds à la tête, et ce vernis séchait à l’instant même.

Dans un angle de la salle, deux maîtres des cérémonies soulevèrent la tenture et mirent à découvert une pierre sur laquelle étaient inscrits les mots : Pax, Omen, Nema. La pierre, ayant été descellée, laissa voir un caveau, large de soixante-dix centimètres à peine, mais profond de deux mètres au moins. Ce trou, en forme d’étui, était le tombeau réservé au fakir momifié.

La momie fut descendue de la table de granit, toujours avec mille précautions. Le grand-maitre sauta d’un bond sur le sol, donna à tous le signal de se lever, et l’on opéra l’emmurement.

Pax ! Omen ! Nema ! fit l’officiant.

Et l’assemblée de répondre :

Pax ! Nemo ! Amen !

À cet instant, la momie venait d’être introduite dans le trou.

L’officiant se tourna silencieusement vers l’orient et éleva les bras en l’air. Les yeux de la tête d’argent figurant au centré du grand soleil d’or s’illuminèrent de nouveau, projetant une vive lueur verte sur l’orifice de l’étrange tombeau ; puis, ils s’éteignirent. On replace la pierre ; les interstices furent bouchés au ciment, et la tenture noire retomba.

Ce fut tout. On ralluma les lampes. Le frère Walder adressa aux assistants un petit discours de circonstance, célébrant le palladisme indien et ses merveilles.

Consummatum est, dit-il en terminant.

Là-dessus, nous sortîmes. La solennité fut déclarée interrompue par une « récréation ». En d’autres termes, la foule des assistants se répandit dans une vaste salle-annexe, bien aérée, où des Indiens servirent des rafraîchissements.

Cette halte dans le satanisme était vraiment nécessaire ; nous avions tous besoin d’un peu de repos, moi plus que les autres.

Tout en absorbant des boissons, on devisait. Cresponi plaisantait avec les dévadasis. Walder développait des théories. Hobbs m’expliquait que, tous les dix ans, on murait de la sorte un fakir luciférien en état d’abiose, qui suspendait sa vie par le seul effort de sa volonté et qui ne devait ressusciter que dans un nombre de mois ou d’années fixé.

Ici, je crois utile de couper mon récit par de courtes explications. Je m’adresse au grand public, et non à quelques spécialistes ; ce livre est un ouvrage de divulgation. Il se pourrait que des lecteurs crussent que je prétends leur en imposer, tant ces faits paraissent invraisemblables. Un auteur est forcément suspecté, dès qu’il dénonce des choses extraordinaires. Aussi, dois-je répéter aux personnes qui l’ignorent, que l’abiose a