Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/227

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convention et dire les mots secrets. Spencer proclama que la réception de la néophyte était définitive et heureuse pour l’assemblée, et tout le monde applaudit par deux coups en criant : — Caïn ! Caïn !

Mais les sacrilèges n’étaient point terminés.

Le grand-maître. — Très illustre chevalière grande lieutenante, notre tâche est-elle accomplie ?

La grande lieutenante. — Il nous reste à enseigner à notre nouvelle sœur chevalière comment nous châtions le traître.

Le grand-maître, s’inclinant devant la grande-maîtresse. — Vaillante et très éclairée grande-maîtresse, ma sœur et mon égale, pour la gloire de Lucifer, notre Dieu, termine ce que tu as si bien commencé.

La grande-maîtresse, à la nouvelle chevalière. — Illustre et chère sœur, je t’ai dit tout à l’heure que le royaume de l’humanité t’appartenait par la discrétion, la volonté, l’énergie et la science. Ta discrétion, j’en suis sûre ; ta volonté et ton énergie, tu nous en as donné de grandes preuves ; notre science, nous te l’avons communiquée. Mais j’ai ajouté que, pour exercer cet empire, il te fallait encore, en vertu de notre doctrine sacrée, opérer de deux façons : l’une, qui te permettrait de triompher physiquement du Principe du Mal, en ressuscitant l’homme mort, et ce triomphe physique, tu l’as obtenu ; l’autre, qui te permettrait de triompher moralement, en meurtrissant Adonaï jusque dans sa divinité malfaisante, et c’est ce triomphe moral que tu vas obtenir avec nous… Tu sais comment Adonaï et le traître Jésus se sont livrés à notre discrétion. L’heure du châtiment a sonné… Les prêtres affirment que leur Christ et son prétendu père sont réellement dans ce qu’ils nomment l’eucharistie. Eh bien, soit. Sur l’eucharistie, donc, vengeons, en châtiant le traître, vengeons tous les martyrs immolés par l’obscurantisme !

Le grand-maître. — Très illustre chevalier premier grand maître des cérémonies, fais approcher de l’Autel de la Sagesse la dernière Maîtresse Templière reçue et ses deux Garants de Fidélité, ainsi que la sœur Idouna-Fréki à qui nous venons de conférer aujourd’hui le dernier degré féminin palladique.

Cet ordre fut exécuté. Miss Arabella fut placée à gauche du petit autel pentagonal ; la sœur reçue à la précédente initiation, à droite. C’était une dame ou demoiselle, assez jeune, vingt-trois ans tout au plus, à la mine sournoise, aux sourcils froncés, courte, petite et légèrement grosse. Ses Garants de Fidélité, un Kadosch du Palladium et une Maîtresse Templière, se rangèrent derrière elle.

— Sœur Padaël-Swadha, as-tu rempli ton devoir ? commença mistress Vandriel, interpelant la jeune personne.

— Oui, grande-maîtresse, répondit celle-ci.