Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/240

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prépare ses sbires ; les tigres humains se lèchent les babines, à l’odeur cruente du sang frais qui vient.

Mais, avant de montrer les complots de l’enfer et de ses suppôts contre les prêtres envoyés par Dieu, il me faut faire connaître au lecteur, par un rapide coup d’œil d’ensemble, la situation du satanisme, ses influences générales et ses agissements, dans l’Extrême-Orient, et plus particulièrement en Chine et au Japon.

En Chine, le culte de Satan, considéré comme étant le vrai Dieu, remonte à la plus haute antiquité. Les premiers missionnaires, qui pénétrèrent dans ces contrées, furent stupéfaits en constatant que la religion dominante, le bouddhisme transformé en lamaïsme, était en réalité une imitation diabolique du catholicisme ; et c’est là, en effet, ce qui est extraordinaire. Dans le bouddhisme prêché par Çakiamouni, en dehors des théories doctrinales qu’un chrétien repousse forcément en raison de sa foi, il y a du moins certaines idées philosophiques qui sont parfois d’un ordre élevé ; mais, dans le lamaïsme, qui est un bouddhisme tout différent de celui dont le philosophe indien fut l’initiateur, la religion est vraiment infernale, démoniaque au dernier degré, parodiant le catholicisme, non seulement dans ses sacrements, avec office quotidien des prêtres comportant une communion de pain azyme distribué aux fidèles, mais même dans sa liturgie et ses plus petites pratiques de dévotion, depuis les aspersions d’eau bénite jusqu’aux récitations d’un rosaire pieusement égrené.

D’autre part, dans l’histoire du peuple chinois, rien n’est plus difficile que de démêler ce qui est fiction ou légende et ce qui est vérité. Ainsi, qui pourrait dire les origines exactes de cette nation ? Personne ; et les Chinois eux-mêmes moins que qui que ce soit. Voyez, par exemple, le nom qu’ils se donnent, et étudiez leurs traditions. Ils s’intitulent « les fils du Ciel, » et ils prétendent que leur pays a été peuplé, dans les temps préhistoriques, par des esprits « tombés du ciel au cours d’une lutte avec les mauvais génies. » Que l’on dise ce qu’on voudra, il y a dans cette tradition quelque chose de mystérieux et d’étrange.

Lorsqu’on étudie de près les théories des adversaires de la divinité une, on arrive toujours à constater que leur système se résume à un renversement plus ou moins compliqué des dogmes catholiques : les esprits, qui sont les mauvais pour nous, sont pour eux les bons ; notre Dieu est leur diable, et réciproquement. Par conséquent, en examinant avec soin la tradition que je viens de citer, il est facile d’y voir une interprétation luciférienne de la révolte des mauvais anges et de la victoire remportée sur eux par les milices fidèles commandées par l’archange Saint-Michel.

Les Chinois exècrent le Dieu des chrétiens, et ils divinisent son en-