Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/259

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Puisque j’étais à Shang-Haï, je tenais à assister à une séance de la San-ho-hoeï. Cresponi surtout m’en avait dit monts et merveilles, avait allumé au plus haut point ma curiosité. Comparant les épreuves des lucifériens chinois avec celles de la franc-maçonnerie ordinaire, il m’avait assuré que, dans le Rite Céleste dont l’origine est attribuée au philosophe Zi-ka, les adeptes, au lieu de poignarder ou décapiter des mannequins, se coupaient la tête pour tout de bon entre eux, — oui, vous l’entendez bien, entre eux ; — ces fanatiques, afin de s’assurer constamment les uns vis-à-vis des autres au point de vue de la discrétion, afin d’être certains que chacun d’eux est toujours prêt à braver tous les supplices plutôt que de livrer le commun secret qui les unit, ont imaginé de tirer au sort, de temps en temps, au cours d’une tenue, lequel des affiliés présents sera, séance tenante, torturé par les autres assistants, décapité ou coupé en morceaux ; et le supplice, l’exécution, m’avait affirmé Cresponi, a réellement lieu, n’est nullement un simulacre ; et c’est de gaieté de cœur, le plus joyeusement du monde, peut-on dire, que celui des initiés qui a été désigné par le sort s’offre et sert à l’expérience, heureux de montrer à ses frères à quel point on pouvait compter sur lui. Cette réciprocité permanente du meurtre, accompli à titre d’expérimentation, montre de quoi sont capables les lucifériens de la San-ho-hoeï.

Voici, à présent, quelques renseignements généraux sur cette importante branche de la maçonnerie universelle :

La San-ho-oeï n’admet pas de sœurs maçonnes et n’a qu’un seul grade. Dans le public, on les appelle « les hommes du secret » ; eux, ils donnent à leur grade unique le titre de « Sublime et Discret Vengeur ».

Le luciférien chinois se voue spécialement à l’assassinat des missionnaires catholiques. Toutes les émeutes ayant entraîné des massacres de nos Pères Jésuites, de nos Sœurs de charité et d’autres vaillants pionniers de la civilisation chrétienne, ont été décrétées dans les temples secrets de la San-ho-hoeï, préparées et fomentées par les initiés.

Au Rite Céleste, les nombres sacrés sont au nombre de quatre ; ce sont les nombres 3, 7, 9 et 11. Parmi ceux-ci, le premier est appelé « nombre sacré extérieur », parce que c’est celui qui est exclusivement usité dans les relations de frère à frère hors des temples. Ce nombre sacré de trois s’explique ainsi : 1° Tcheun-Young (c’est-à-dire Lucifer-Dieu), avec ses armées célestes commandées par 2° Zi-ka (c’est-à-dire Baal-Zéboub ou Belzébuth), triomphera de 3° Dieu-Diable ou cochon Yé-su (c’est-à-dire Adonaï ou Jésus-Christ, indistinctement).

Ainsi, pour se reconnaître, on glisse dans la conversation un sujet quelconque donnant prétexte à demander la valeur d’un multiple de trois, le premier venu, par exemple :