Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/523

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torche, et vous crierez par trois fois le mot sacré de votre grade palladique… Alors, une voix vous répondra, et vous posera des questions d’ordre particulières, que vous devez connaître, ainsi que les réponses, puisque votre grade vous confère le droit de visiter nos ateliers et notre laboratoire. Aussitôt après ce tuilage, une des niches, à quatre mètres au-dessus du sol, s’éclairera, et l’entrée vous sera donnée…

— C’est parfait, mon très cher frère ; j’ai fort bien compris, dis-je à mon compagnon. Néanmoins, pour m’éviter toute erreur, nous allons récapituler, et vous me permettrez de noter cet itinéraire, qui est un peu compliqué.

— Évidemment, puisqu’il s’agit de dérouter les profanes… Récapitulons.

À la clarté d’une mèche-bougie que j’allumai et que je lui passai, j’écrivis sur un feuillet de mon calepin le résumé de l’itinéraire, en ces termes :

« 1° Aux deux tiers d’arc de cercle, à gauche, entrée de la première chambre ; 2° là, sur six passages, le troisième à droite est l’entrée de la deuxième chambre ; 3° dans ladite, sur deux passages, prendre celui de la flaque d’eau, entrée de la troisième chambre ; 4° la, sur cinq passages, choisir le troisième, très bas, où il faut se plier en deux, pour pénétrer dans la Chambre du Milieu, quatrième chambre ; 5° quarante-cinq pas à gauche, le long de la paroi circulaire, mur formant comme porte de placard entr’ouverte, couloir étroit, s’y glisser pour atteindre l’entrée de la cinquième et dernière chambre, quadrangulaire. »

Quand j’eus fini d’écrire :

— Ah ! ça, dis-je à mon palladiste, est-ce que les contre-maîtres et ouvriers ont à faire chaque jour un trajet aussi accidenté, pour se rendre aux ateliers et au laboratoire ?

Il ne me répondit pas, mais eut un sourire énigmatique.

— Je vous quitte, fit-il ; voici votre guide qui arrive.

Nous nous serrâmes la main, et il s’en alla.

Le guide se mit en devoir de disposer tout son attirail de cordages et de crampons. Il allume deux torches, m’en donna une, planta l’autre dans une anfractuosité ; puis, il eut bientôt fait de fixer solidement l’extrémité d’une longue échelle de corde, et il la laissa tomber doucement le long du précipice au bord duquel nous nous trouvions.

La lueur des torches me permit de voir, en face de moi, de l’autre côté du gouffre, une masse imposante, majestueuse, de stalactites de toute beauté, formant en quelque sorte une butte renversée et suspendue dans l’espace. Pour pénétrer plus avant dans la grotte, il était indispensable de descendre le long de la paroi à pic.