Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/591

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mais scientifiquement et expérimentalement cette fois. Puis, nous referons l’expérience avec nos pseudo-médiums.

« Je tiens, en effet, messieurs, à vous faire toucher du doigt et à vous montrer, dis-je, expérimentalement et scientifiquement, la supercherie des prétendus spirites. Rien ne me sera plus facile que cela.

« Tout d’abord, reproduisons les phénomènes. Nous allons voir ce qui se passe pour le simulateur et comment il s’y prend ; puis, nous examinerons la part prise par le névropathe inconscient ; enfin, nous montrerons à l’œuvre le complice volontaire. »

Et ici, le président expliqua ce que le lecteur sait déjà et ce que je lui ai révélé chemin faisant.

« — Nous voici, dit-il, assis tous trois en triangle devant ce guéridon extrêmement léger, monté sur trois pieds, eux-mêmes sur des roues mobiles, et qui peuvent donc avec la plus grande facilité aller et venir sur un parquet lisse et ciré comme celui-ci. Remarquez la façon dont nous sommes ainsi : le docteur et mon assistant, carrément, chacun une main posée à plat sur le bois ; moi, un peu de travers et plus écarté qu’eux et a main à demi-fléchie sur la tranche. Voyez donc cette position : tandis que mes deux vis-à-vis restent neutres, une simple contraction, si légère soit-elle, des muscles de mon bras, le biceps seulement, et voilà un craquement dans le guéridon, deux craquements, trois craquements, un roulement même si je veux ; ce qui sera d’autant plus sensible lorsque j’opérerai avec un guéridon à moi connu, souvent employé, dont je connaîtrai pour ainsi dire les endroits craquants et qui sera de préférence en bois très sec, pitchpin surtout on acajou. »

Et, joignant l’exemple à la parole, le président frappa des coups et exécute des roulements à simuler presque un tambour.

Puis, il continua :

« — Suivez bien des yeux mon bras et ma main ; vous n’y apercevez rien, n’est-ce pas, de suspect ? mais vous allez voir tout de suite quelque chose qui va vous sauter aux yeux, dès que vous serez prévenus. Suivez bien ce qui se passe sur mes mains ; regardez-les un peu à contre-jour : eh bien, chaque fois que la table craquera, vous surprendrez un très léger mouvement fibrillaire, comme une onde qui passera sur le brillant de la peau tendue, et vous apercevrez ainsi trembloter imperceptiblement les tendons des extenseurs digitaux ; enfin, vous verrez la pulpe de l’extrémité de mes doigts s’aplatir avec un très léger déplacement.

« Ces caractéristiques vous paraîtront bien plus nettes encore, si ma main se trouve interposée entre une lumière et votre œil ; les jeux de lumière et d’ombre accentueront les petits déplacements que je vous indique.