Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/660

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Cette étude de l’hystérie se justifie donc et n’aura pas été inutile, je crois. Un petit tableau la rappellera au lecteur :

Hystérie. — Prédisposition atavique, — premiers symptômes du jeune âge, — crise, — manifestations de la jeunesse, — entrée en jeu du système nerveux cérébro-spinal, — manifestations de l’âge mûr, — contractures, — imitation de maladies, — hémianesthésie, — phénomènes cérébraux, — catalepsie, — somnambulisme.


Puisque à propos de l’hystérie je suis accidentellement revenu à cette Inde si curieuse, si suggestive, et qui a été en quelque sorte le point de départ dans mon enquête, je vais y rester un instant et montrer, à propos précisément de l’hystérie dont nous nous occupons en ce moment, combien ici encore tout diffère, tout s’agrandit, tout se monstrualise, dans ce pays de Satan, à côté duquel comme étendue de territoire, comme population, comme nature, nous autres les Européens qui nous croyons d’une telle importance, nous ne sommes que pygmées et qu’avortons.

L’hystérie là-bas est monumentale, comme le reste ; elle est grandiose et saisit tout un peuple au grand air et au plein soleil ; elle se caractérise par des actes d’une sublime horreur, alors que chez nous au contraire elle est l’apanage de quelques névroses seulement, hommes ou femmes qui la couvent à l’abri des murs, en serre chaude, sous une cloche à melon, avec des symptômes ridicules, une grimace, au lieu d’un coup de dent. Dans l’Inde, c’est la grande furie hystérique, l’épidémie de toute une race, la forêt qui couvre l’espace et vit ; chez nous, c’est rien, moins que rien, une maladie de quatre sous, la fleurette qui pousse et meurt au coin d’un vieux mur. Arrière nos hospices où se contorsionnent quelques bonnes d’enfants en rupture d’anse du panier, soigneusement triées sur le volet pour de soi-disant études scientifiques, et place aux palais gigantesques, aux cérémonies énormes où deux millions d’hommes sont saisis par la névrose au même instant !

Tenez, regardez en plein Paris cet homme ou cette femme atteints de la crise. Quelques grimaces, les yeux blancs roulés en boule de loto, et c’est fini ; mais franchissez les murs, allez seulement jusqu’à Constantinople, et les derviches tourneurs vont vous montrer déjà un spectacle bien autrement intéressant, une forme bien autrement curieuse de l’hystérie.

Mais il me faut tout d’abord, pour l’intelligence de ces faits, parler de ce que l’on appelle l’hypnotisme et la suggestion.

Nous savons déjà, en partie, tout au moins, ce que sont ces deux choses. Prenons en effet l’hystérie, telle que nous la connaissons avec toutes ses phases, et supposons que, au lieu de survenir naturellement chez un