Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/846

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pouvait certainement pas s’élancer par ses seules forces naturelles. On la fit communier, et elle fut aussitôt calmée.

Un bon prêtre, transporté de joie, s’écria en parlant au diable :

— Ô maître Gonin, te voilà vaincu !

Mais, quand une fois l’hostie fut digérée, les démons revinrent et paralysèrent les membres de Nicole. Elle faillit même être emportée par le démon Baltazo.

Vingt-neuf autres démons noirs, avec des griffes de chat et gros comme des moutons, vinrent renforcer Belzébuth. Ce fut une vraie lutte entre les exorcistes et la bande infernale ; ce combat dura fort longtemps.

Enfin, en 1566, vingt-six diables furent définitivement chassés à Notre-Dame de Liesse. Un autre prit la fuite à Pierrepont ; mais il déclara que le reste de la meute ne délogerait que devant messire Jean Dubourg, évêque et duc de Laon.

Nicole fut donc conduite à Laon, où l’évêque l’exorcisa en personne. Les exorcismes dans la ville épiscopale furent publics, comme les autres, et eurent lieu à la cathédrale, où une estrade fut dressée par les ordres du prélat. On accourut à cet étrange spectacle de tous les coins de la France et même de l’étranger. « Un grand nombre de protestants, rapporte l’abbé Lecanu, se convertirent à la vue de phénomènes extraordinaires et surtout de la guérison de la possédée, qui fut obtenue après trois mois d’exorcismes publics. »

L’évêque Jean Dubourg chassa les trois derniers diables, qui s’étaient montrés si obstinée. Astaroth sortit sous la forme d’un porc ; Cerbère, sous la forme d’un chien ; et, en dernier lieu, Belzéhuth, sous la forme d’un taureau, « lequel, après avoir confessé la présence réelle dans l’Eucharistie, disparut dans une fumée épaisse, accompagné de deux coups de tonnerre ».

Cette solennelle et définitive expulsion, où Nicole souffrit un véritable martyre, comme on le comprend sans peine, laissa la pauvre femme presque morte ; elle fut rendue à la santé par une oraison de saint Bernard, que l’évêque récita sur sa tête.

L’histoire de Nicole de Vervins, ai-je dit, a été mentionnée par un grand nombre de théologiens et d’autres écrivains catholiques. L’un d’entre eux, Collin de Plancy, après sa conversion, parla de cette affaire, en même temps que de quelques autres faits de possession, et il émit un léger doute sur celle-ci, à cause de la sortie extraordinaire des trois derniers démons du corps de Nicole. Or, cette sortie d’Astaroth, Cerbère et Belzébuth, sous les formes de porc, chien et taureau, est certifiée, au procès-verbal officiel authentique, par les nombreux témoins oculaires. D’où il s’ensuit que Bizouard, dans son Histoire des rapports de l’homme