Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/902

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Lorsqu’on lui donna l’extrême-onction, les démons sortirent de son corps et se jetèrent dans celui d’un religieux du couvent, dont les convulsions et les hurlements ne cessèrent qu’après l’enterrement. »

Les magistrats firent mettre cette épitaphe sur la tombe du père Tranquille :

« Cy-git l’humble père Tranquille, prédicateur capucin : les démons, ne pouvant plus supporter son courage dans les exorcismes, l’ont fait mourir par leurs vexations, le dernier jour de mai 1638. »

« Le lendemain des funérailles, pendant l’exorcisme qui se faisait dans l’église des Capucins, un diable s’en alla sur la fosse, et grattant la terre avec la main de la possédée, il la jetait de côté et d’autre. Peu après, agitant les mains de la fille, comme fait un boulanger qui pétrit de la pâte, il dit, tout enragé : « C’est ainsi que le père Tranquille fait de moi. » Le même démon assura avec serment que c’étaient les démons et les magiciens qui l’avaient fait mourir ; mais qu’ils n’y avaient pas gagné, parce qu’il soutenait plus que jamais les possédées auprès de Dieu. »

Après la mort du père Tranquille, la possession diminue de plus en plus ; le roi, ayant appris de divers endroits que cette possession ne faisait plus autant d’éclat, jugea à propos de retrancher la pension qu’il donnait pour l’entretien des exorcistes ; finalement, le couvent des Ursulines de Loudun rentra dans l’ordre.

Cette possession extraordinaire avait duré six ans entiers ; elle avait commencé à se déclarer au mois de septembre 1632, et elle ne finit réellement que sur la fin de 1638.

La mère Jeanne des Anges, paralysée de la moitié du corps dans les dernières années de sa vie, mourut le 29 janvier 1665, en odeur de sainteté.

Quant au père Surin, sa persécution par les démons dura vingt ans, avec quelques rares intervalles de repos. Cependant il recouvre définitivement le calme et la santé en 1658, et mourut à Bordeaux le 21 avril 1665.


Voilà donc des cas nombreux, — et j’aurais pu multiplier les citations, — où la possession de l’homme par le démon est indiscutable.

Possédés actifs, possédés passifs, les uns et les autres sont nombreux au dix-neuvième siècle, comme au moyen-âge, comme à certaines époques troublées où le diable voit sa chaîne s’allonger dans des proportions effrayantes. J’ai expliqué tout à l’heure (page 838) la distinction entre ces deux genres de possession. Aujourd’hui, les mœurs et la situation politique des états ont changé ; le rôle bienfaisant de l’Église a été partout