Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/950

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Comment les démons s’emparent-ils des possédés ? Ce sont là des faits surnaturels que je n’ai pas le droit de dévoiler.

Ce que je sais pour avoir entendu la jeune fille me le dire, je ne le répéterai pas. C’est le secret du confessionnal, si ce n’est pas le secret professionnel.

Toujours est-il que la science était impuissante à guérir la malade. Il y avait au moment de sa guérison dix-huit mois qu’elle était abattue. Or, de février à novembre de l’an dernier, seuls les médecins ont approché son chevet, lui donnait alors du bromure, plus tard des bains. Le bromure n’a eu aucune action ; les bains ont été malfaisants. Et, après comme avant, elle restait dans son lit, ne pouvant pas marcher, ne mangeant pas, en proie à d’horribles crises persistantes.

La science n’a rien pu pour elle, parce qu’elle n’était pas seulement hystérique, mais aussi démoniaque. Nous sommes venus, nous avons chassé les démons, et elle est guérie. Elle marche, elle va et vient de Châteaufort à Gif. Lundi dernier, je l’ai emmenée à Paris avec ses camarades du village. Son langage est maintenant celui d’une jeune fille réservée et modeste. Sa famille était plutôt incrédule et remplissait mal ses devoirs religieux. Les siens, ainsi qu’elle, se sont inclinés devant la puissance de Dieu, et ils aiment maintenant la religion.

Les médecins ont pu à leur aise faire montre de leur science ; personne ne les a éloignés de la malade. M. Dumontpallier a essayé les passes magnétiques. Nous étions présents. Je le vois encore nous disant : « Encore un effort, elle va s’animer. » Mais la jeune fille restait sur son lit, effondrée et blême. Je priais, et tout à coup je la voyais se dresser sur son séant, se ranimer, ouvrir les yeux. La lutte entre les démons et l’Église commençait.

On a dit qu’elle nous insultait. Oui, les premières fois ; quand les démons parlaient par sa bouche, nous avons été insultés par eux comme les médecins. N’était-ce pas à M. Dumontpallier qu’ils disaient en ricanant et en produisant un souffle : « Tiens, médecin, pique donc mon souffle avec ton épingle, si tu le peux ».

Aujourd’hui tous les démons ont été expulsés. La jeune fille est redevenue elle-même ; elle n’a pour nous que des paroles d’attendrissement.

Elle est guérie enfin. Elle pourra être malade, de maladies auxquelles nous sommes tous sujets ; mais elle n’est plus démoniaque et les crises ne se renouvelleront plus.


Qu’ajouter à cela ?… Blanche Guyon elle-même confirma les faits à tous les reporters qui vinrent l’interroger. « Pourquoi attaquez-vous M. le curé ? leur disait-elle. Vous avez lu les mauvais journaux ; ils mentent. C’est moi qui ai demandé à M. le curé de me soulager. Les prières ne m’ont pas fait de mal ; au contraire ! » On insinua que la famille Guyon disait comme le curé, parce qu’il lui était venu en aide pécuniairement ; on déclara que Blanche, nullement guérie, était sur le point d’entrer à l’hôpital. Rien n’était plus faux ; et la vérité est que, depuis sa délivrance par les exorcismes, la malade se porte admirablement bien. Elle n’était donc pas malade, mais réellement possédée. La médecine matérialiste en a été pour sa courte honte.