Page:Taxil, Mémoires d'une ex-palladiste parfaite, initiée, indépendante.djvu/239

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il voulut, un jour, évoquer l’esprit qui lui permettait de voir de cette sorte, dans le secret et à distance. Cet esprit avait nom « Nergal ». Sa présence était nécessaire, chaque fois, pour la réussite, de son œuvre de surveillance. Ce jour-là, il voulait lui demander de lui permettre de voir sa fille au moyen du miroir magique ; en son opinion, ce n’était point enfreindre la défense du Dieu-Bon.

Nergal ne répondit point à son appel ; mais Baal-Zeboub parut et lui déclara que cela même n’était pas possible. Philalèthe n’insista pas ; il se jeta aux pieds de Baal-Zeboub et le pria de faire excuser par Lucifer sa témérité.

Un autre jour, — ceci se passa en 1675, à Hambourg, — en entrant chez lui dans sa chambre, le soir très tard, pour se coucher, il s’aperçut que son lit était défait et occupé par quelqu’un qui paraissait de petite taille, un enfant au sommeil. Ayant approché sa lampe, il vit que l’occupant, le dormeur, était un tout jeune peau-rouge, d’environ sept ans, c’est-à-dire de l’âge qu’avait alors son petit-fils.

Il contemplait longuement l’enfant.

Et voici que celui-ci se réveilla, étonné d’abord, plus encore que Philalèthe, et bientôt effrayé, ne reconnaissant pas cet homme qui se tenait là, debout.

Philalèthe se sentait heureux. Quelque chose en lui, un sentiment instinctif, lui disait que c’était vraiment le fils de sa Diana, et son cœur remerciait les surnaturelles puissances qui avaient accompli le prodige, qui avaient apporté l’enfant, pour lui donner le plaisir de le voir un peu, auprès de lui, à défaut de la mère.

Or l’enfant parla, exprimant sa crainte, malgré les efforts de Philalèthe, qui par des caresses voulait le rassurer ; mais l’embarras de l’alchimiste était grand, puisqu’il ne comprenait pas le langage qu’il entendait.

Alors il s’écria :

« — Dieu-Bon, c’est bien là l’enfant de ma fille ; je vous remercie du fond du cœur. Achevez votre œuvre ; faites que je puisse lui parler !… »

Et soudain, il eut la science de la langue lennape ; l’enfant se montra moins craintif, se laissa embrasser. Philalèthe lui dit qu’il était de son sang, dans les termes que l’on peut employer pour expliquer à un petit garçon cet âge. Il lui parla de sa mère, et l’enfant, se familiarisant de plus en plus, lui raconta ses jeux, lui donna quelques aperçus sur la vie de ses parents.

Puis, — car Lucifer, rapporte Thomas Vaughan, avait voulu que cette