Page:Taxil, Mémoires d'une ex-palladiste parfaite, initiée, indépendante.djvu/622

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cependant, un jour, il se laissa prendre encore une fois la main dans le sac.

Une lettre qui lui avait été adressée de Rome fut vue, ayant été prêtée par lui à un de ses amis, M. Georges Bois. En substance, cette lettre disait : « T∴ C∴ F∴ Paul Rosen, vous pouvez affirmer que le nom d’un F∴ Cresponi ne figure pas sur les registres du Sup∴ Cons∴ d’Italie. » M. Georges Bois montra cette lettre à M. l’abbé de Bessonies, qui ne put s’empêcher de faire remarquer combien il était étrange qu’un maçon italien écrivit à Paul Rosen en l’appelant son Très Cher Frère, trois ans après la Bénédiction Apostolique ; car cette lettre est de 1893. Et quel était de maçon qui entretenait correspondance avec Rosen ? M. l’abbé de Bessonies a retenu le nom et l’a dit à nos amis. Cette lettre était signée Ulisse Bacci. Or, Ulisse Bacci est le secrétaire particulier de Lemmi !…

Décidément, Paul Rosen n’a pas de chance avec les lettres.

On s’étonnera peut-être que le fait de cette correspondance avec le F∴ Ulisse Bacci n’ait pas frappé M. Georges Bois, ne lui ait pas ouvert les yeux. Moi, je n’en suis pas surprise : la nature humaine a parfois des aveuglements invraisemblables. Dans ma vie très mouvementée, dans les nombreuses missions qui m’ont été confiées par les chefs de la Haute-Maçonnerie et qui souvent m’ont mise en rapport avec des hommes politiques et diplomates d’un rang très élevé, j’ai beaucoup vu, beaucoup observé, sondé parfois des cœurs jusque dans leurs replis les plus intimes, et j’ai acquis ainsi une expérience bien au-dessus de mon âge.

Juger M. Georges Bois sur ses seuls articles serait commettre une grave erreur. Son style étincelant, sa phrase alerte, toutes ses brillantes qualités de polémiste dénotent une intelligence hors de pair. On dira : « Voilà un homme à qui il serait malaisé d’en faire accroire. » Appréciation fausse, n’étant basée que sur une observation extérieure, c’est-à-dire sur une observation aussi incomplète que possible. Pour juger quelqu’un, il ne suffit pas de voir son esprit, il faut surtout pénétrer dans son cœur. Or, il est deux épreuves infaillibles : si vous voulez savoir ce que vaut une femme, mettez-lui un enfant dans les bras ; si vous voulez savoir ce que vaut un homme, placez-le en face d’une grande infortune morale.

Or, je suis certaine que M. Georges Bois a un excellent cœur. La grande infortune morale que les hasards de la vie lui ont fait rencontrer est celle d’un de mes ex-Frères, sympathique entre tous, à qui il a voué une vive et profonde amitié, et c’est précisément la détresse du malheureux qui l’a intéressé ; même en ces temps où la tempête des négateurs fait crever sur tous les maçons convertis indistinctement les noirs nuages des suspicions, M. Georges Bois garde à Jean Kostka une amitié fidèle, et pourtant M. Georges