Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/64

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singulières. Souvent Michel Avériânytch ne rencontrait plus le docteur chez lui, ce qui autrefois n’arrivait jamais. Et Dâriouchka était tout effarée de voir son maître boire de la bière en dehors des heures accoutumées, et arriver en retard pour dîner.

Un jour, au commencement de juin, le docteur Khôbotov vint pour affaire chez André Efîmytch, et, ne l’ayant pas trouvé chez lui, il alla dans la cour pour le chercher. On lui dit que le vieux docteur était à l’annexe. Khôbotov y entra, et, arrêté dans le vestibule, il entendit la conversation suivante :

– Nous ne nous accorderons jamais et vous ne me convertirez jamais à votre croyance, disait Ivan Dmîtritch exaspéré. Vous ne savez rien de la réalité et vous n’avez jamais souffert. Vous vivez comme une sangsue, de la souffrance d’autrui. Moi j’ai souffert sans trêve depuis le jour de ma naissance. Aussi je vous le dis nettement : je me considère, à tous les points de vue, comme plus élevé et plus compétent que vous. Ce n’est pas à vous de me donner des leçons.

– Je n’ai pas du tout la prétention de vous convertir à ma façon de voir, répondit André Efîmytch paisiblement, regrettant qu’on ne voulût pas le comprendre. La question n’est pas là, mon ami, La question n’est pas que vous ayez souffert