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Page:Terrail - La France socialiste.djvu/360

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mière phase informe et indéterminée. Aussi ces propositions n’ont-elles encore qu’un sens purement utopique.

L’importance du socialisme et du communisme critico-utopiste est en raison inverse du développement historique. À mesure que la lutte des classes s’accentue et prend une forme, ce fantastique dédain pour la lutte, cette fanatique opposition à la lutte, perdent toute valeur pratique, toute justification théorique. C’est pourquoi si, sous bien des rapports, les fondateurs de ces systèmes étaient des révolutionnaires, les sectes formées par leurs disciples sont toujours réactionnaires ; car ces disciples s’obstinent à opposer les vieilles conceptions des maîtres à révolution historique du prolétariat. Ils cherchent donc, au nom de la logique, à émousser la lutte des classes et à harmoniser les antagonismes. Ils rêvent toujours la réalisation expérimentale de leurs utopies sociales, l’établissement de phalanstères isolés, la création de colonies à l’intérieur, et la fondation de petites Icaries — édition in-douze de la nouvelle Jérusalem ; — mais pour arriver à bâtir tous ces châteaux en Espagne, ils se voient forcés de faire appel à la philanthropie des sacoches et des cœurs bourgeois.

Petit à petit, ils tombent dans la catégorie des socialistes réactionnaires ou conservateurs, dépeinte plus haut, et ne s’en distinguent plus que par un pédantisme plus systématique et par une foi superstitieuse dans l’efficacité miraculeuse de leur science sociale.

Ils s’opposent donc avec acharnement à tout mouvement politique de la classe ouvrière, qui ne peut provenir que de son parfait manque de foi dans le nouvel évangile.