Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/123

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a toujours agi au nom de Dieu le Père, qu’il a vécu dans la personne des patriarches et des prophètes, Fils du Créateur, Verbe de celui qui l’a fait son Fils, en l’engendrant de sa substance, dès-lors arbitre des dispositions et des volontés paternelles. Placé pour un peu de temps au-dessous des anges, comme le chante le psalmiste, et dans cet abaissement prodigieux, façonné par son Père à cette humanité qui vous répugne si fort, le Verbe essayait l’homme, et préludait, dès l’origine, au rôle qu’il remplirait dans la plénitude des temps. C’est lui qui descend sur la ferre, lui qui interroge, lui qui sollicite, lui qui jure. Au reste, l’Evangile qui nous est commun atteste que le Père ne se montra jamais à qui que ce fût. « Personne ne connaît le Père, si ce n’est le Fils, dit Jésus-Christ. » C’est encore lui qui avait prononcé cet oracle dans l’Ancien Testament : « Nul ne verra Dieu sans mourir. » Il nous annonçait en termes assez clairs que le Père était invisible, mais que, Dieu lui-même, et rendu visible aux hommes, il agissait au nom et par l’autorité du Père, Christ pour nous identifié à notre nature, et par là même tout à nous. Donc, toute la part de grandeur et de majesté que vous réclamez pour Dieu, résidera dans le Père. Il sera invisible, impalpable, inaccessible, habitant au sein d’une paix inaltérable : ce sera, si vous le voulez, le Dieu des philosophes. Mais ce qui dans votre pensée répugne à la majesté suprême, faites-en le partage du Fils dans sa chair mortelle, de ce Fils incarné que nos yeux aperçoivent, que nos oreilles entendent, que nos sens découvrent ; ambassadeur du Très-Haut, arbitre et ministre de ses volontés, associant en lui l’homme et le Dieu ; Dieu par ses prodiges, homme par ses abaissements, donnant à l’homme tout ce qu’il ôte à Dieu ; enfin tout ce qui est à vos yeux le déshonneur de mon Dieu est le sacrement du salut des hommes. Dieu est venu habiter avec les hommes pour apprendre aux hommes à vivre en Dieu, Dieu a agi comme l’égal de l’homme, afin que l’homme puisse agir comme l’égal de Dieu.