Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/160

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par le jugement, du ciel sur la terre ! Ce même taureau reparaîtra encore dans les Ecritures, lorsque Jacob étendant sa bénédiction sur Siméon et Lévi, c’est-à-dire sur les scribes et les pharisiens (car cette race est fille de Siméon et de Lévi), le patriarche s’écrie allégoriquement : « Siméon et Lévi, tous deux frères : la fraude les a convertis en instruments de violences ; » ces violences par lesquelles ils ont persécuté le Christ ! « Mon ame n’est point entrée dans leur complot, mon cœur ne s’est point uni à leurs assemblées, quand leur fureur a égorgé des hommes, » quels hommes ? sinon les prophètes, « et quand ils ont percé les membres du taureau, » c’est-à-dire, du Christ qu’ils ont immolé comme les prophètes, et sur lequel ils ont assouvi leur haine en le clouant à un gibet. Au reste leur reprocher, après le massacre des prophètes, d’avoir mis à mort quelque animal, serait par trop ridicule, si c’était là un taureau vulgaire.

Que dire de Moïse, priant assis et les mains étendues pendant que Josué combattait Amalec ? Pourquoi celle attitude, lorsque tout autre, au milieu de la consternation publique et pour rendre sa prière plus favorable, eût fléchi les deux genoux en terre, eût meurtri sa poitrine, eût roulé son visage dans la poussière ? Pourquoi ? sinon parce que là où combattait le nom de Jésus qui devait terrasser un jour le démon, il fallait arborer l’étendard de la Croix par laquelle le nouveau Josué remporterait la victoire ? Que signifie encore le même Moïse, après la défense de se tailler aucune image, dressant un serpent d’airain au haut d’un bois, et livrant aux regards d’Israël le spectacle salutaire d’un crucifié, au jour où des milliers d’Hébreux périrent par des serpents ? C’est que là encore était représentée la puissance miraculeuse de la Croix, dont la vertu triomphait de l’antique dragon ; c’est que tout homme mordu par les serpents spirituels n’avait qu’à regarder et croire, pour être guéri de la blessure de ses péchés, cet emblème qui lui annonçait le salut.