Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/266

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XXVI. En prière dans un lieu écarté, il s’adresse au Dieu supérieur, mais en levant des yeux impudents et téméraires vers le ciel du Créateur, Dieu terrible, Dieu barbare, qui aurait pu l’écraser de sa grêle et de sa foudre, de même qu’il a pu l’attacher à vin gibet dans Jérusalem.

Un de ses disciples l’aborde. « Maître, dit-il, apprenez-nous à prier, comme Jean l’a enseigné à ses disciples ; » sans doute parce qu’il fallait des prières différentes pour un Dieu différent. Il faut que l’auteur de cette conjecture nous prouve auparavant qu’un Dieu différent avait été promulgué par le Christ ; car personne n’aurait voulu prier avant de savoir qui il priait. Il l’avait appris, dis-tu. Prouve-le donc. Si tu ne peux le faire jusqu’ici, sache-le bien ! ce disciple ne demandait que la manière de prier le Créateur auquel s’adressaient de leur côté les disciples de Jean. Mais comme Jean avait enseigné une nouvelle manière de prier, le disciple du Christ crut devoir, et non pas sans raison, interroger son maître, afin que lui et ses compagnons apprissent de sa bouche, non pas à prier un Dieu différent, mais à le prier différemment. Le Christ n’eût pas communiqué au disciple la manière de prier avant la connaissance de Dieu lui-même. Il enseigna donc au disciple la manière d’invoquer celui que le disciple connaissait jusqu’alors. Enfin reconnais quel Dieu manifestent les termes eux-mêmes de l’invocation. A qui dirai-je Père ? A celui qui n’est pour rien dans ma naissance ? à celui dont je ne tire pas mon origine ? ou bien à celui qui m’a enfanté deux fois, dans mon corps et dans mon ame ? A qui demanderai-je l’Esprit saint ? A celui qui ne donne pas même l’esprit du monde, ou bien à celui qui « créa les esprits célestes pour être ses messagers, » et dont « l’Esprit reposait sur les eaux avant la création ? » Hâterai-je de mes vœux le règne de celui que je n’ai jamais entendu nommer le roi de gloire, ou bien le règne de celui « entre les mains duquel sont même les cœurs des rois ? » Qui me donnera mon pain de tous les jours ? Celui qui n’a pas même