Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/347

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cela se fait-il, si le Créateur n’intervient pas ici pour châtier les offenses d’Israël ou du genre humain, en confondant la sagesse et la prudence humaines ? Les deux textes suivants de l’apôtre confirmeront cette vérité : — « Dieu n’a-t-il pas confondu la sagesse de ce monde ? » — « En effet, Dieu voyant que le monde avec sa sagesse ne l’avait point connu dans sa sagesse, il lui a plu de sauver par la folie de la prédication ceux qui croiraient. » Mais d’abord un mot sur cette expression le monde, puisque la rare sagacité des Marcionites entend par là le Créateur du monde. Pour nous, conformément aux habitudes du langage qui prend le plus souvent le contenant pour le contenu, ce mot signifie tout simplement l’homme qui habite le monde. Le cirque a poussé un cri ; le forum a parlé ; la basilique a frémi : qu’est-ce à dire ? ceux qui se trouvaient là. Conséquemment, puisque c’est l’homme, habitant du monde, et non pas le Dieu Créateur de celui-ci, qui dans sa sagesse n’a point connu le dieu qu’il aurait dû connaître, le juif par la sagesse des Ecritures divines, l’idolâtre par la sagesse des œuvres de Dieu, c’est donc le même Dieu, qui, méconnu dans sa sagesse, résolut de confondre la sagesse humaine en sauvant tous ceux qui croiraient à la folie de la prédication de la Croix. Pourquoi ? « Parce que les Juifs demandent des miracles, » lorsque déjà l’infaillibilité divine leur était prouvée par tant de prodiges ; « parce que les Grecs courent après la sagesse, » leur sagesse, et non celle de Dieu.

D’ailleurs, s’il s’agissait ici de la promulgation du Dieu nouveau, quelle eût été la faute des Juifs en réclamant des prodiges pour appuyer leur foi ? en quoi les Grecs eussent-ils été si coupables de rechercher une sagesse qui fortifiât leurs convictions ? Ainsi l’aveuglement des Juifs et des Gentils atteste le « Dieu jaloux et vengeur » qui, par un châtiment juste, a confondu la sagesse du monde. Que si les motifs appartiennent au même Dieu dont on allègue les Ecritures, j’en conclus que l’apôtre « par ce