Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 1.djvu/427

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ont emprunté aux astres leur chair. S’il est. impossible de le prouver parce que cela n’est point écrit, la chair du Christ, contre laquelle on se prévalait de l’exemple des anges, n’en viendra point non plus. Il est certain que les anges revêtaient une chair qui ne leur était pas propre, puisque ce sont des substances spirituelles qui, si elles ont un corps, n’ont qu’un corps d’une espèce particulière. Toutefois ils peuvent, par leur transfiguration en chair humaine, se montrer pour un temps et converser avec les hommes. Puisque l’Ecriture ne dit pas d’où ils ont pris leur chair, il nous reste à croire fermement que le caractère distinctif de la puissance angélique, c’est de revêtir un corps sans le secours d’aucune matière.


A plus forte raison, me dis-tu, à l’aide de quelque matière. ---- Cela est vrai ; mais là-dessus, rien de positif, parce que l’Ecriture ne s’explique pas. D’ailleurs, pourquoi ceux qui peuvent se faire eux-mêmes ce qu’ils ne sont pas par nature, ne pourraient-ils pas se rendre tels sans le secours d’aucune matière ? S’ils deviennent ce qu’ils ne sont pas, pourquoi ne le deviendraient-ils pas de ce qui n’existe point ? Quand un être qui n’existait pas commence d’exister, il est tiré du néant. Voilà pourquoi il ne faut ni demander, ni montrer ce qui advient ensuite du corps des anges. Tiré du néant, il est rentré dans le néant. A vrai dire, ceux qui oui pu se transformer eux-mêmes en chair, peuvent aussi convertir le néant en chair : c’est un plus grand acte de puissance de changer la nature que de créer la matière.

Mais s’il fallait croire que les anges eussent emprunté leur chair à quelque matière, il serait plus raisonnable de penser que c’est à une matière terrestre plutôt qu’à tout autre substance céleste, puisque leur chair était si bien terrestre qu’elle se nourrissait de nos aliments terrestres. Enfin, que cette chair ait été tirée des astres, je le veux bien ; qu’elle se soit nourrie de nos aliments terrestres, sans être terrestre, à peu près comme la substance terrestre