Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 2.djvu/262

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pour leur faire nier, avec leur nom, tous les crimes que ce seul nom vous paraît renfermer.

Serait-ce, par hasard, que vous répugneriez à frapper des hommes que vous regardez comme des scélérats ? Vous dites à ce Chrétien homicide : Niez. Persiste-t-il à se déclarer Chrétien, vos verges déchirent le sacrilège ; mais si vous n’agissez pas ainsi envers les coupables, vous nous jugez donc innocents, et puisque nous sommes innocents, pourquoi ne nous permettez-vous pas de persister dans une déclaration que la nécessité seule condamne à défaut de la justice ? Un homme élève la voix : Je suis Chrétien ! ce qu’il est, il le proclame ; vous, vous voulez entendre ce qu’il n’est pas. Assis sur vos tribunaux pour obtenir l’aveu de la vérité, nous sommes les seuls auxquels vous imposiez le mensonge. Vous demandez si je suis Chrétien ; je réponds que je le suis, et vous m’appliquez à la torture ! votre torture veut donc me corrompre ? J’avoue, et vous ordonnez la question ! que feriez-vous donc si je niais ! Vous ne croyez pas facilement les autres lorsqu’ils nient ; pour nous, à peine avons-nous dit non, vous voilà convaincus.’

Un tel renversement de l’ordre doit vous inspirer la crainte qu’il n’y ait quelque force secrète qui vous porte à agir contre toutes les formes, contre la nature même des jugements, contre les lois : car, si je ne me trompe, les lois ordonnent de découvrir les coupables, non de les cacher ; de les condamner quand ils ont avoué, non de les absoudre : c’est ce que veulent les décrets du sénat et les édits des empereurs.

Le pouvoir, dont vous êtes les dépositaires, n’a rien de tyrannique, il est réglé par les lois. Aux tyrans seuls d’employer les tortures comme peines ! chez vous, la loi ne les ordonne que pour découvrir la vérité : servez-vous-en, à la bonne heure, mais jusqu’à l’aveu seulement. Prévenues par la confession, elles deviennent inutiles ; il ne reste qu’à prononcer, à infliger au coupable la peine qu’il a méritée, et non point à l’y soustraire. Et quel est le juge