Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/240

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

à examiner comment le Verbe s’est fait chair, s’il s’est transfiguré dans la chair, ou s’il en a revêtu la réalité. Oui, il en a pris la réalité. D’ailleurs, il faut croire nécessairement que Dieu, en sa qualité d’éternel, est immuable et répugne à toute transformation. Or, la transformation est l’anéantissement de ce qui est ancien. Tout ce qui se transforme en une autre chose, cesse d’être ce qu’il avait été, et commence à être ce qu’il n’était pas. Dieu, au contraire, ne peut ni cesser d’être, ni être autre chose que ce qu’il est. « Le Verbe est Dieu, et le Verbe du Seigneur demeure éternellement, » en gardant toujours sa forme. S’il n’admet pas de transformation, il en résulte que, par son incarnation, il faut entendre la chair qu’il a prise, et par laquelle il se manifeste, devient visible et se laisse toucher, parce que tout le reste exige ce sens. Si, en effet, le Verbe est devenu chair en vertu d’une transformation et par un changement de substance, la substance de Jésus qui est une, va être je ne sais quel mélange de deux substances, la chair et l’esprit, comme l’ambre qui est un composé d’or et d’argent, et par là même il cesse bientôt d’être or, c’est-à-dire esprit, et argent, c’est-à-dire chair, lorsque par ces transformations il devient un troisième je ne sais quoi. Qu’arrive-t-il ? Jésus ne sera plus Dieu. Car le Verbe a cessé d’être en devenant chair. Il ne sera plus chair, c’est-à-dire homme ; car celui qui a été Verbe ne peut être chair à proprement parler. Ainsi, par ce mélange de l’un et de l’autre, il n’est plus ni l’un ni l’autre ; il est bien plutôt un troisième être qu’il n’est tous les deux à la fois.

Il y a mieux. Nous le trouvons nommé clairement homme-Dieu dans les chants du psalmiste. « Un Dieu-homme naquit en elle ; il l’a édifiée par la volonté de son Père….. » Des deux côtés assurément, Fils de l’homme et Fils de Dieu, puisqu’il est Dieu et homme, et différent sans aucun doute dans sa propriété, en vertu de l’une et de l’autre substance, puisque le Verbe n’est pas autre chose