Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/474

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être Juifs d’origine. Mais le Seigneur a distingué la multitude des idolâtres en deux espèces, ceux qui étaient pécheurs, par l’office qu’ils remplissaient, c’est-à-dire les publicains, et ceux qui étaient pécheurs par nature, c’est-à-dire qui ne remplissaient pas l’office de publicains. D’ailleurs, on ne lui eût pas reproché de s’asseoir à la table des Juifs, mais des infidèles, avec lesquels la loi mosaïque défendait de manger.

Maintenant il faut considérer d’abord dans la parabole de l’Enfant prodigue ce qui est plus utile. Car l’égalité des exemples ne peut être admise, si tout en correspondant exactement à l’image, elle est nuisible au salut. Or, nous voyons que l’essence fondamentale du salut, placée dans le maintien de la discipline, est anéantie par l’interprétation qu’adoptent nos adversaires. Car si celui-là est vraiment Chrétien qui, après avoir reçu de Dieu son père le trésor du baptême, de l’Esprit saint, et conséquemment de la vie éternelle, s’en va loin de son père, prodigue follement ses biens dans les dissolutions du paganisme, se dépouille des dons de l’intelligence, se vend en esclave au prince du siècle, qui n’est autre que le démon, et en reçoit, l’ordre de garder les pourceaux, c’est-à-dire de nourrir les esprits immondes, puis s’avise un beau jour de retourner avec larmes à son père, qu’arrivera-t-il ? C’est que, non-seulement les adultères et les fornicateurs, mais les idolâtres, les blasphémateurs, et les apostats de quelque nature qu’ils soient, satisferont à la justice du Père par cette parabole. Dès lors s’anéantit toute la substance du sacrement. Qui craindra désormais de dissiper ce qu’il aura la faculté de recouvrer ensuite ? Qui prendra soin de conserver éternellement ce qu’il ne pourra perdre éternellement ? La sécurité du crime est une invitation au crime. Ainsi donc l’apostat recouvrera son premier vêtement ; il revêtira de nouveau l’Esprit saint ; il portera de nouveau l’anneau sacré qui scella son baptême ; le Christ s’immolera de nouveau pour lui, et il s’assiéra encore une