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Page:Tertullien - Apologétique, trad Valtzing, 1914.djvu/19

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8. Et pourtant, malgré ce fait, ils ne s’avisent pas de présumer l’existence de quelque bien caché. Il ne leur est pas permis d’être plus justes dans leurs soupçons ; il ne leur plaît pas de s’assurer de plus près. En cette occasion seule, la curiosité humaine est engourdie. Ils aiment à ignorer, alors que d’autres sont ravis de connaître ! Anacharsis blâmait les illettrés qui se font juges des lettrés : combien plus aurait-il blâmé ceux qui ne savent pas et qui se font juges de ceux qui savent ! — 9. Ils aiment mieux ne pas connaître, parce que déjà ils haïssent. Ils préjugent ainsi que ce qu’ils ne connaissent pas est tel que, s’ils le connaissaient, ils ne pourraient pas le haïr. En effet, si l’on ne découvre aucun juste motif de haïr, le mieux est, à coup sûr, de renoncer â une haine injuste ; si, au contraire, on acquiert la certitude que le juste motif existe, non seulement la haine ne perd rien de sa force, mais on trouve une raison de plus pour persévérer, précisément parce qu’on peut se glorifier d’être juste. — 10. Mais, dites-vous, on ne peut préjuger qu’une chose est bonne, de ce qu’elle attire beaucoup d’hommes ; que de gens, en effet, se laissent façonner au mal, que de gens passent au vice comme des transfuges ? — Qui le nie ? Mais pourtant ce qui est vraiment mauvais, ceux-là mêmes que le mal entraîne n’osent pas le défendre comme bien. La nature a rempli de crainte ou couvert de honte tout ce qui est mal.

11. Après tout, les méchants cherchent à se cacher, ils évitent de se montrer ; pris sur le fait, ils tremblent ; accusés, ils nient ; même si on les met à la torture, ils n’avouent pas facilement ni toujours ; condamnés sans espoir, ils sont tristes, ils se reprochent en eux-mêmes leurs actes, ils imputent au destin ou aux astres les égarements de leur esprit malfaisant. En effet, ils ne veulent pas être les auteurs du mal, parce qu’ils