Page:Tharaud - Dingley.djvu/108

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme un homme qui protège contre un grand vent la lumière de sa lanterne. Son cheval avançait sur l’herbe, sans bruit, comme un fantôme, dans un silence émouvant. La lune et le ciel constellé éclairaient cette vaste plaine, sillonnée de longues dunes à peine de la hauteur d’un homme, qui donnaient à ces solitudes l’aspect d’une mer dont les vagues se seraient solidifiées. Parfois une puissante odeur se dressait sur son passage, comme un invisible mur. Les convois et les colonnes avaient jalonné de charognes la piste qu’il suivait. Parmi tant de bêtes tombées, quelques-unes n’étaient pas tout à fait mortes. À l’approche du cavalier, elles relevaient la tête en hennissant, ou bien se dressant sur leurs jambes elles s’enfuyaient, éperdues et la crinière au vent, pour s’abattre plus loin. Et ces hennissements, mêlés au sourd battement d’ailes et aux cris des vautours dérangés dans leur besogne, interrompaient seuls le silence. Derrière lui, les foyers du camp, d’où s’élevait une fumée rougeâtre, marquèrent quelque