Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/290

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parmi les esprits malfaisants ; ne prenez donc pas la peine de promener inutilement au bas d’une requête votre pinceau fleuri ; car en vérité, je ferai décapiter cet homme ! »

« Je sais pertinemment, objecta Liu-Fan, que le docteur Yu-Ky a le pouvoir, par ses prières, de faire souffler le vent et tomber la pluie. Maintenant que le ciel est sec, que ne lui ordonnez-vous de demander les eaux du ciel pour racheter la peine qui le menace ? — Soit, répondit Sun-Tsé, au moins je verrai ce que sait faire ce sorcier. »

Aussitôt tous les officiers qui gardaient la prison délièrent la cangue et les fers du vieux Tao-Ssé ! Il lui fut ordonné de faire tomber une pluie bienfaisante pour sauver le peuple d’une imminente famine. Le prisonnier fit ses ablutions, changea de vêtements, et dit aux mandarins qui l’entouraient : « Je demande trois pouces d’une pluie bienfaisante pour sauver le peuple. Mais, je ne puis guère éviter la mort qui m’attend ! — Et les officiers répondirent  : Si vous accomplissez un miracle qui puisse convaincre notre maître, il vous respectera ! »

« Le temps accordé au souffle de ma vie est arrivé à ce point, répliqua le Tao-Ssé, qu’il m’est difficile d’échapper. » Puis, se liant lui-même avec une corde, il se coucha au soleil. L’officier chargé d’exécuter les ordres de Sun-Tsé vint avertir le devin que si à midi la pluie n’était pas tombée, il serait brûlé vif dans ce lieu même. Déjà on avait envoyé des hommes chercher du bois sec qui formait un grand bûcher dans le milieu du marché. Tout à coup il souffla un vent furieux ; le nombre des spectateurs s’élevait à plus de dix mille personnes rassemblées en foule et encombrant les rues.

Du haut de la galerie régnant sur le rempart, Sun-Tsé regardait. Dès que la brise s’élève, les nuages se forment dans le nord-ouest et remplissent bientôt la voûte du ciel ; l’officier chargé de veiller l’heure annonce qu’il est midi trois minutes. « Dans le ciel, il y a bien des nuages, dit alors Sun-Tsé, mais la pluie bienfaisante ne tombe pas ! Cet homme n’est qu’un imposteur ! — Prenez le vieux Tao-Ssé, cria-t-il aux gens desa suite, et étendez-le sur ce bûcher. » On met le feu aux quatre coins de la