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Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/359

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même tout au long à l’intendant du palais, Wang-Siéou, qui arrivait de Tsing-Tchéou. « Mais, répondit le mandarin, les frères ne sont-ils pas comme la main droite et la main gauche d’un même corps ? Et à la face du monde ils s’armeraient les uns contre les autres !… Quoi, je me couperais la main droite, et je dirais : La victoire est à moi… Cela serait-il possible ! Si l’on s’abandonne entre frères, si l’on ne se traite pas comme parents, de qui devra-t-on espérer de l’affection dans le monde ? Si des hommes perfides veulent séparer la chair et les os (les membres d’une même famille), et font voir en échange un intérêt peu durable, on doit se boucher les oreilles et ne pas écouter leurs paroles ; et même si on met à mort ce mandarin, ce conseiller artisan de fourberies, le peuple revient affectueusement vers son maître et le regarde avec complaisance ; il le défend si bien de tous côtés, que rien à travers l’Empire ne peut arrêter sa marche victorieuse. Je vous en prie, seigneur, réfléchissez… — Retirez-vous ! » lui cria Youen-Tan avec colère ; et (persistant dans son projet) il envoya porter l’invitation à Youen-Chang.

Ce dernier consulta Chen-Pey : « Très certainement il y a là quelque stratagème sorti de la tête de Kouo-Tou, dit le mandarin ; si vous allez à ce festin, seigneur, vous serez victime de quelque odieuse machination. — En ce cas, quoi faire, demanda le jeune prince ? — Profiter de cette occasion pour attaquer les armes à la main ; voila le meilleur plan ! »

Youen-Chang revêt son armure et va déployer hors des remparts ses cinquante mille hommes ; à la vue de cette démonstration hostile, Youen-Tan comprend que ses projets sont déjoués. Il se couvre de sa cuirasse, monte à cheval et va combattre son jeune frère. Aux provocations injurieuses de celui-ci, celui-la répond par de violentes accusations. « Tu as empoisonné notre père, pour usurper l’autorité souveraine, et voilà que tu viens vers ton frère aîné pour l’assassiner ! » Les deux fils de Youen-Chao croisent le fer ; Tan est complétement battu ; Chang, à travers une grêle de pierres et de flèches enfonce et culbute les lignes ennemies ; puis il revient avec ses divisions, laissant le vaincu se retirer en fugitif avec les débris de ses troupes, dans