Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/117

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trop allumé et trop hardi des femmes de Séville. Feu Gutierrez, son père, était né à Valence, et elle tenait de lui ces beaux cheveux blonds des Valenciennes qui accompagnent si bien leur teint blanc et leur mine souriante. Au bout de deux semaines, je crus m’apercevoir qu’elle préférait ma société à celle des autres pensionnaires et que mes façons plus réservées m’avaient précisément gagné sa sympathie.

Cette sympathie se manifestait par de délicates attentions dont j’avais seul le privilège. Chargée de l’entretien de ma chambre, Manuelita s’acquittait de ce soin avec un zèle minutieux, et quand j’y rentrais, aux heures de travail, je ne manquais pas de trouver sur ma table un verre plein de roses ou d’œillets dont elle était allée faire emplette au marché, dès la première heure ; elle devinait mes plats préférés et elle s’arrangeait pour que sa mère les fit entrer dans la composition du menu de chaque jour. Parfois, dans nos réunions du soir, quand, absorbé par une de mes méditations, je semblais oublier le milieu dans lequel je me trouvais, si je relevais brusquement la tête, je rencontrais les yeux bleus de Manuelita en train de se fixer