Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/136

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mes méditations était rompu à chaque instant par son souvenir, et entre les pages de mon livre se glissait, à chaque tour de feuillet, son spirituel profil au nez espiègle et au menton proéminent. En vain, pour me soustraire à cet ensorcellement, j’essayais de me réfugier comme jadis à l’ombre de la chapelle du baptistère et de m’abîmer dans la contemplation du Saint Antoine de Padoue. Ô vision sacrilège ! à la place du niño Jésus, c’était elle, la bailadora, qui surgissait au milieu du nimbe radieux des saints anges, puis avançait dans une buée lumineuse et descendait vers moi, sur les nuées blondes, avec son malicieux regard et son attirant sourire, tandis que ses petits pieds aux fines chevilles battaient de rapides taconeos (coups de talon) ! C’était vers elle que je tendais les bras maintenant sous les nefs sacrées de la cathédrale !…

Les solennités de la semaine sainte avaient suspendu les représentations des bailadores ; je ne savais encore quand je reverrais la Pamplina, mais je n’avais plus qu’un seul désir, — la revoir. Aussi, dès le mercredi saint, lorsque les processions des confréries commencèrent à sortir, je ne quittai plus la place de la Constitucion, où les