Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/140

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mandeuses des mendiants, la fumée et l’odeur âcre des fritures l’emplissaient tout entière. Arrêté par un encombrement, je regardais machinalement une procession descendre de San Salvador par la calle Gallegos, qui s’étoilait des cierges des pénitents, tandis qu’au loin la luxueuse illumination du paso dominait toute l’enfilade de la rue de ses centaines de lumières tremblotantes. Brusquement je sentis mon bras effleuré par un coup d’éventail ; je me retournai… C’était la Pamplina, debout à mon côté, la tête enveloppée dans une mantille noire qui ne laissait quasi voir que ses deux yeux étincelants. J’eus une violente commotion au cœur ; la fastueuse illumination de la procession disparaissait toute devant l’éclat de ces deux yeux phosphorescents.

Buena noche, seňor estudiante ! me dit-elle d’une voix mordante.

Je restai d’abord interdit et agité par un tremblement intérieur qui m’ôtait toute présence d’esprit.

— Après le bal, la pénitence, continua-t-elle du même ton. Voilà une belle nuit pour effacer ses péchés en suivant les pasos.