Page:Theuriet - Bigarreau, 1886.djvu/162

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faire quand la fatalité nous sépare ?… De même que tu ne peux rompre ton engagement et rester ici, de même moi, je ne puis quitter Séville pour te suivre.

— Qui t’en empêche ? dit-elle en tournant doucement vers moi ses yeux câlins et mouillés.

— Mais, répliquai-je hésitant, tout : mes études, les promesses que j’ai faites à mes supérieurs, les vœux que j’ai déjà prononcés…

— Et ne m’as-tu pas fait aussi des promesses, et ne sont-elles pas aussi sacrées que celles que tu as marmottées aux gens de ton séminaire ?… Quand il s’agissait de m’avoir, n’as-tu pas juré que tu m’aimais plus que ton église et ta vocation ? Eh bien ! si tu es un honnête homme et non un traître, tiens ta parole et viens avec moi !…

J’étais encore trop novice dans la vie et trop aveuglé par mon amour pour distinguer entre un engagement pris de sang-froid et une promesse faite dans l’emportement de la passion. L’argument de Pastora Florès me troubla, je faiblis, elle s’en aperçut, devint plus pressante, et, après quelques timides objections qu’elle combattit victorieusement, je consentis à la suivre à